ds_gen N. 6 – 2007 – Cronache

 

XXVII SEMINARIO INTERNAZIONALE DI STUDI STORICI

“DA ROMA ALLA TERZA ROMA”

IL POPOLO NELLA STORIA E NEL DIRITTO

DA ROMA A COSTANTINOPOLI A MOSCA

Campidoglio, 19-21 aprile 2007

 

nuova cartella-55 028

 

Organizzato dall’Unità di ricerca ‘Giorgio La Pira’ del Consiglio Nazionale delle Ricerche e dall’Istituto di Storia Russa dell’Accademia delle Scienze di Russia, con il contributo dell’Università di Roma ‘La Sapienza’, si è svolto a Roma, come d’uso nella storica sede del Comune di Roma in Campidoglio, nei giorno 19-21 aprile 2007, il XXVII Seminario Internazionale di Studi Storici “Da Roma alla Terza Roma” «Il Popolo nella storia e nel diritto da Roma a Costantinopoli a Mosca».

Di seguito il “Promemoria” di Pierangelo Catalano ed il programma del Seminario.

 

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PROMEMORIA

di Pierangelo Catalano*

 

Sommario: INTRODUCTION. – 1. Le concept romain de populus. – 2. Le veče des villes russes. – 3. Ljudi et volonté divine. – 4. Continuité des concepts. I. Respublica-Civitas. – 1. Le peuple (societas des universi cives) et la ville. – 2. Le concept de civitas entre anciens et modernes. – 3. Civitas augescens. – 4. Homines. – 5. Romani. La conscience de la Nouvelle Rome. – 6. Universalité romaine et nationalismes. – 7. De Constantinople à Moscou: l’Empire chrétien de la Troisième Rome. – 8. Čelovek, christianskie ljudi, svjatorusskoj imperii. – 9. La citoyenneté romaine (universelle) contre la “globalisation”. II. Urbs – 1. Le concept juridico-religieux d’urbs. – 2. Augustum augurium et populus Romanus. – 3. Urbs et principium (potissima pars). – 4. Meliora auguria et utraque Roma. – 5. Constantinople nouvelle Rome. – 6. La fondation de Moscou. – 7. Mosca città «murata» e «imperiale». – 8. Moscou et les villes. Les "citoyens" (graždane). III Populus Dei  – 1. Iuppiter omnipotens et le Peuple romain. – 2. Auspicia populi et distinction entre magistratures et sacerdoces. – 3. "Laïcisation" de la jurisprudence e "Isolierung" du droit. – 4. Laos e ethne dans le Nouveau Testament. – 5. Peuple de Dieu. – 6. La notion de laïcité. – 7. Etre suprême et "religion civile" (Rousseau, Robespierre, Mazzini). IV «Dio e Popolo». Roma e Giuseppe Garibaldi (alcuni testi).

 

INTRODUCTION

1. – Le concept romain de populus.

La définition philosophique de populus que nous trouvons chez Cicéron, De rep. 1.25.39 «coetus multitudinis iuris consensu et utilitatis communione sociatus», en mettant en évidence les éléments du «consentement» juridique, de la «communion» d’utilité, ne tient bien sûr pas compte des éléments ethniques ou territoriaux. Elle est conforme au concept juridique de populus (explicite chez Alfenus Varus, implicite chez Julien et chez d’autres juristes) comme un ensemble dont les citoyens sont les «parties». Elle s’oppose donc à tout concept de «Volk», de «Nation» et de «Staat» ayant une base ethnique nationale ou raciale, même si celle-ci est revetue d’une apparence religieuse. En latin il ne faut pas confondre populus avec natio ou gens (voir Cicéron, De off. 1.53).

2. – Le veče des villes russes.

Avant la christianisation, les villes russes étaient gouvernées par un prince, mais une partie importante des décisions politiques, y compris – dans de nombreux cas – les décisions concernant l'élection du prince, la guerre, la paix ainsi que les décisions d'importance capitale, étaient dévolues au veče, l'assemblée des hommes libres de la ville. Parfois limitée à un rôle de remplacement lors d'une vacance de pouvoir, quelquefois d'importance fondamentale, la fonction du veče revêtait une telle importance symbolique, et politique, que le signe de l'assujettissement de Novgorod à Ivan III, grand prince de Moscou, avait été le déplacement de la cloche du clocher de la cathédrale qui était utilisée pour appeler les citoyens lors de la réunion de l'Assemblée.

Mais au-delà de la fonction politico-institutionnelle que l'assemblée populaire remplissait effectivement dans l'histoire des villes russes, le peuple est souvent protagoniste dans l'image que les chroniques donnent du gouvernement des terres russes.

La Povest Vremennych Let rapporte à plusieurs occasions les interventions 'institutionnelles' importantes du veče (cf. V. Sergeevič, Russkija Juridičeskija Drevnosti, vol. II, SPb 1893).

A Moscou au contraire, l'importance de l'assemblée populaire était pratiquement inexistante. En effet, la ville avait été fondée par un prince rjurikide qui l'avait toujours gouvernée sans interférence de la part de ses habitants et, après le principat d'Ivan Kalita, pas même de la part du Khan, qui lui avait concédé son soutien. [G. Maniscalco Basile]

3. – Ljudi et volonté divine.

Plus tard, dans les sources du XVIe siècle, le peuple (ljudi) est le protagoniste: par exemple lorsqu'il exhorte Vladimir (qui n'était pas encore appelé Monomaque) à envoyer une expédition contre Constantinople; cette expédition se terminera par le don, de la part du βασιλέυς romain d'Orient, de la couronne du Monomaque et de la coupe de sardonique qui témoignait de l'ascendance ausgustéenne du prince de Kiev.

Mais le rôle le plus explicitement constituant du peuple est affirmé dans les chroniques de la fin du XVIe et du début du XVIIe siècle moscovite: lors de la vacance du trône de Moscou, après l'abdication d'Ivan IV, après les interruptions dynastiques à la mort de Fedor Ivanovitch et ensuite à la mort de Boris Godounov, et après l'abdication de Vassili Chouiski.

A l'occasion de ces événements – alors que la ligne dynastique, qui à travers le pouvoir créatif et génératif de Dieu indiquait Sa volonté, était interrompue – le peuple assure la fonction explicite d'interprète de la volonté divine en choisissant celui qui doit assumer un pouvoir qui vient de Dieu. Le Piskarevskij Letopisec, la plus tardive des sources qui nous racontent ces périodes de désordre et d'incertitude institutionnelle, décrit de façon très claire le peuple en assemblée qui, craintivement et en tremblant, dans le silence et la méditation, attend que Dieu murmure à son oreille le nom du Car. Michel Fédorovitch Romanov (Piskarevkij Letopisec. Materjaly po Istorii SSSR, II, Dokumenty po istorii XV-XVI vv., sous la direction de L.N. Puškarev, ANSSSR, Moskva 1955).

Ainsi, dans l’ombre d'un rôle en apparence subalterne – tant aux premiers siècle de son histoire qu'au temps de la consolidation de l'autocratie – le peuple remplit en Russie une fonction fondamentale et, dans le cadre d'une conception politico-théologique de la souveraineté moscovite, la vox populi est vraiment la vox Dei. [G. Maniscalco Basile]

4. – Continuité des concepts.

La continuité de Rome à la Troisième Rome ne comporte pas nécessairement une continuité des instruments conceptuels juridiques de la civitas universelle romaine dans l’Empire œcuménique de Moscou.

a) Il semble qu’il manque le concept de civis. Les termes a.s.e. graždanin, a.r. gorožanin, gradskij čelovek indiquent, au sens juridique, le status des habitants de la ville, ce qui implique des obligations considérables et le droit à la liberté puisque, dans la Slavie orthodoxe comme en Allemagne, “Stadtluft macht frei”.

b) Les termes homo et populus correspondent de façon assez précise à čelovek et ljudi. Čelovek indique l’être humain en général et chaque individu dont le status juridique est certain: p.ex. služilyj čelovek (qui prête service), posadskij čelovek (l’habitant des faubourgs lié à sa résidence et à sa profession), kabal’nyj čelovek (l’esclave pour dette). Ljudi exprime aussi bien le pluriel de čelovek qu’un concept assez semblable à celui de populus.

Le peuple par excellence est celui qu’indique l’expression christianskie ljudi: c’est-à-dire sans aucune connotation ethnique ou territoriale, mais s’opposant aux jazyki (ethne, gentes) dont on souhaite l’intégration dans l’Empire chrétien.

c) Il faut aborder une recherche sur les concepts juridiques concernant l’espace: locus, domicilium, origo, patria; et ceci également dans les langues grecque et slaves.

d) Les Séminaires 2000 à Moscou et 2001 à Rome ont approfondi l’étude des concepts de “saint” et de “sainteté” dans les langues latine, grecque et slaves. L’inviolabilité des murs (sancti) de l’urbs se situe à l’origine (inauguratio) de Rome: voir Pomponius D. 1.8.11. Masurius Sabinus précisa que les murs des municipes aussi sont saints: voir Marcien D. 1.8.8.2 «in municipiis quoque muros esse sanctos, Sabinum recte respondisse Cassius refert: prohiberique oportere, ne quid in his immitteretur»; cf. Hermogenien D. 43.6.2 en ce qui concerne également les “autres lieux saints”.

Nous devons réfléchir, à propos de la “sainteté”, sur le parallélisme entre les murs de l’urbs et les tribuns de la plebs. Les tribuns de la plèbe sont inviolables: «tribuni sancti sunto» (Cicéron, de legibus 3.3.9); «fretus sanctitate tribunatus» (Cicéron, pro Sestio 79). La “sainteté” du tribunat de la plèbe, dont la potestas est précisément sacrosancta, a une base sacrée: «leges sacratae» (Cicéron, ibid.). Les empereurs eux aussi seront titulaires de la tribunicia potestas sacrosancta.

La compénétration, dans le fondement de la “sainteté” ancienne, du divin et de l’humain s’exprime dans la définition de sacrosanctum donnée par Cicéron, pro Balbo 33: «primum enim sacrosanctum esse nihil potest nisi quod populus plebesve sanxit: deinde sanctiones sacrandae sunt …».

 

I.

RESPUBLICACIVITAS [1]

1. – Le peuple (societas des universi cives) et la ville.

Le texte qui, en tant que définitionnel, fournit la clé la plus directe pour la compréhension de la notion de ‘république’ dans le droit romain est le célèbre passage du De re publica (1.25.39) où Cicéron écrit: «respublica id est res populi». Toutefois, le fondement du discours cicéronien n’est pas la définition de ‘république’ mais la définition contextuelle de ‘peuple’: «populus autem non omnis hominum coetus quoquo modo congregatus, sed coetus multitudinis iuris consensu et utilitatis communione sociatus» (loc. cit.). Enfin, le populus est le produit d’un ‘contrat de société’. C’est là le ‘principe’ théorétique qui fonde toute la réflexion et toute la reconstruction doctrinaires de Cicéron au sujet de la république.

À la lumière de cette définition, qui est une explication rationnelle (obtenue par un moyen strictement juridique, c’est-à-dire la notion de contrat de société) de la nature du peuple, nous pouvons comprendre, dans toute leur portée: la définition de respublica comme res populi (qui sans cela pourrait paraître une lapalissade) et la définition de peuple comme universi cives, «tous les citoyens» (qui sans cela pourrait paraître banale) que l’on trouve dans les Institutiones de Gaius (1.3) et les Institutiones de Justinien (1.2.4).

Cette définition ultérieure de peuple met en évidence le rapport essentiel entre la notion de populus(-societas) et la notion de civitas (ville, droit de citoyenneté et précisément universitas civium) déjà exprimée par Cicéron, toujours dans le De re publica: «concilia coetusque hominum iure sociati, quae civitates appellantur» (6.13.13; cfr. 1.32.49 «quid est enim civitas nisi iuris («societas»). [G. Lobrano]

2. – Le concept de civitas entre anciens et modernes.

Verrius Flaccus, dans Aulu-Gelle, N.A. 18.7.5, précise trois sens du mot civitas: «‘civitatem’ [dici] et pro loco, et oppido et pro iure quoque omnium et pro hominum multitudine» («un lieu, une ville et aussi le droit de tous et un ensemble d’hommes»).

Le terme civis indique celui qui fait volontairement partie de la civitas, concrète “société de droit”. Cicéron, par une phrase essentielle, réaffirme que la civitas est “une association de droit entre citoyens” De rep. 1.32.49 «quid est enim civitas nisi iuris societas civium?»; quelques lignes auparavant il avait expliqué: «... cum lex sit civilis societatis vinculum ius autem legis aequale, quo iure societas civium teneri potest, cum par non sit condicio civium?» («puisque la loi est le lien de la société civile et que le droit établi par la loi est égal pour tous, grâce à quel droit la société des citoyens pourrait-elle être maintenue, sans créer l’égalité des conditions entre les citoyens?»). Quant à l’élément volontariste, on doit rappeler Cicéron, Pro Balbo, 13.31: «nequis invitus civitate mutetur, neve in civitate maneat invitus!» («aucun ne peut contre son gré changer de citoyenneté; aucun ne peut, malgré lui, rester citoyen»); cf. 12.29.

Pour comprendre l’originalité de la citoyenneté romaine, nous devons rappeler ici que d'après Savigny deux causes ont déterminé et limité la “communauté du droit” (“Rechtsgemeinschaft”): l’origine (“Volksabstammung”) ou nationalité (“Nationalität”) et le territoire (“Landgebiet”). Cependant, Savigny ajoute en parlant de la nationalité (et de la religion qui y est reliée): «similaire à la cause sus-citée de la communauté du droit, mais non pas égale à celle-ci, est la cause qui se trouve dans le rapport civil particulier de certaines classes de personnes. Nous voyons chez les Romains un rapport de ce genre, très développé et de longue durée, dans les classes des cives, latini, peregrini, qui à leur tour se relient aux systèmes du ius civile et du ius gentium».

Au cours de ce siècle, le juriste Fernand de Visscher a souligné que «l’originalité foncière des concepts romains du droit de cité réside dans sa souplesse, qui en fait un lien d’union entre les peuples, tout à l’encontre du concept moderne dont la rigidité en fait un élément de division et même d’opposition».

Dans le cadre de la réflexion moderne sur la pensée politique ancienne, se distingue l'ouvrage de Hannah Arendt, notamment à propos du concept de citoyenneté. H. Arendt échappe à la dichotomie “individualisme” et “collectivisme” et critique le concept de représentation (basée sur les partis et les structures stables bureaucratisées); elle propose l’institution d’un système fédéral de conseils dans lesquels les citoyens seraient engagés à différent niveaux dans les décisions concernant les affaires de la communauté politique. Sa conception de la “sphère publique” s’oppose ainsi à la Gemeinschaft et à la Gesellschaft.

Aujourd’hui le juriste doit considérer l’exemple romain et libérer la citoyenneté des limites de la territorialité et de la nationalité ou de l’origine (identités ethniques, religieuses) qui empêchent la communauté des peuples. [G. Lobrano]

3. – Civitas augescens.

De l’asylum de Romulus sur le Capitole, créé pour l’accueil au sein de la citoyenneté (cives) des étrangers libres et des esclaves, à la constitutio Antoniniana, qui en 212 p. J.-C. étend la citoyenneté à tous les habitants du monde romain (sauf exceptions), jusqu’à la réaffirmation du favor libertatis et à l’élimination du concept de peregrinus dans la codification de Justinien: la croissance (ou l’augmentation) cohérente de la civitas continue, potentiellement universelle, sans conditionnements ethniques (ou nationaux).

A la fin du IIIe siècle av. J.-C. déjà, le roi de Macédoine Philippe V, dans une lettre à la ville grecque de Larissa dans laquelle il demandait que l’on inscrivent les métèques comme citoyens, avait observé: «Les Romains donnent la liberté aux esclaves, ils les accueillent au sein de la population et les font participer aux magistratures... ils ont ainsi non seulement agrandi leur patrie, mais ils ont aussi fondé environ soixante-dix colonies» (Dittenberger, Syll., II, 543). Chez les écrivains latins et grecs la conscience de cette politique de la citoyenneté est forte: de Fabius Pictor à Cicéron, à Velleius Paterculus à Sénèque; de Polybe à Denis d’Halycarnasse à Aelius Aristide. On en a peut-être la formulation la plus expressive, en rapport également avec les charges publiques, dans un discours de l’empereur Claude au Sénat (48 p. J.-C.), en partie conservé dans la Table de Lyon (CIL, XIII, 1668), résumé et plutôt transformé dans Tacite, Ann. 11.24.

Dans cette civitas augescens (cfr. Digesta Iustiniani 1.2.2; 7; 28) et civitas amplianda (Codex Iustinianus 7.15.2), qui réunit les hommes contre tout exclusivisme ethnique, nous avons considéré la position de Saint Paul comme emblématique: «Le tribun se rendit chez Paul et lui demanda: ‘Dis-moi, es-tu citoyen romain?’. Il répondit: ‘oui’. Le tribun répliqua: ‘Moi, je l’ai achetée cher, cette citoyenneté’. Paul dit: ‘Moi, au contraire, je le suis depuis ma naissance’» (Actes des Apôtres, 22.27-28). Parallèlement, la notion de ius Romanum, vu comme un “système du bon et de l’équitable” universel, s’est modelée à partir des sources juridiques (depuis Dioclétien jusqu’à Justinien I); les Juifs eux aussi purent vivre selon le ius Romanum (Codex Iustinianus 1.9.8) et donc être des Romani (cfr. Interpretatio ad Codicem Theodosianum 2.1.10).

Les idées de croissance et d’augmentation de la citoyenneté remontent à l’ancienne république. Ces idées résument la politique de l’attribution de la citoyenneté, également menée à travers la libération des esclaves de la part de chaque paterfamilias.

Le concept de la civitas augescens, qu’on trouve chez le juriste Pomponius, exprime, dans le droit de Justinien (Digesta 1.2.2.7), la synthèse des aspects démographiques, spatiaux et temporels du cadre historico-systématique, à l’intérieur duquel se placent tant la généralisation du status de civis et l’élimination de ceux de peregrinus e Latinus, que le favor libertatis (voir les constitutions de 530 et 531: Codex Iustinianus 7.6.1; 7.15.1 et 2). L’interprétation du ius et la législation impériale sont soutenues par cette grande idée.

Déjà au cours des siècles précédents, les empereurs sont exaltés dans les épigraphes pour l’augmentation de la res publica, de l’imperium Romanum, de l’orbis Romanus, de l’orbis terrarum, du genus humanum.

La superposition d’éléments chrétiens et la centralisation autocratique trouvent leur expression la plus importante à l’époque moderne dans les applications moscovites de la théorie justinienne de la “symphonie” de sacerdoce et empire.

Les instruments juridiques de la croissance de cette civitas universelle sont très nombreux; outre populus et cives (v. supra) il faut au moins rappeler encore homines et Romani.

4. Homines.

Cest la principale notion du titre V (De statu hominum) du livre I des Digesta de Justinien; c’est dans ce titre que l’exposition des sources normatives terminée, commence une synthèse sur les matières privées et publiques. A la notion concrète de homines sont reliées les notions, tout aussi concrètes, de liberi, servi, cives Romani, ingenui, libertini, qui in utero sunt, etc. Le passage d’Hermogenianus, qui donne la raison fondamentale de l’ordre systématique («cum igitur hominum causa omne ius constitutum sit»), ne se réfère pas à la «société» (comme certains l’ont erronément cru ces dernières années), mais aux homines dans leur pluralité concrète.

La notion juridique concrète de homines qui est à la base de la notion abstraite de humanitas si caractéristiquement romaine, est très ancienne. On la retrouve jusque dans les formules archaïques de l’indictio belli (Tite-Live 1.32.11 et 13) où elle implique la participation des hostes au ius fetiale. De même la notion de homo est employée dans les formules solennelles du ius civile (pour l’acquisition et la défense des droits du Quirite: voir Gaius 1.119; 2.24; 4.16, à propos de mancipatio, in iure cessio, legis actio sacramenti), pour indiquer les esclaves. Et c’est à cette notion que le juriste Brutus fait appel («in fructu hominis homo esse non potest»: Ulpien, D. 7.1.68pr.; cf. 5.3.27 pr. et Gaius, D. 22.1.28.1 «cum omnes fructus rerum natura hominum gratia comparaverit») opposant, selon l’expression de Giuseppe Grosso, «un limite allo sfruttamento capitalistico dello schiavismo».

5. – Romani. La conscience de la Nouvelle Rome.

C’est dans le caractère «romain» permanent de l’Empereur de Constantinople (de la politeia ou basileia) comme il résulte des titres et des dénominations officielles, que l’on retrouve l’aspect formel le plus évident de la continuité en Orient.

Romani (comme il ressort aussi des actes de notre second Séminaire) n’est pas un concept ethnique. En Orient, le terme grec Rhomaioi assure une continuité terminologique, conceptuelle (c’est une notion politico-juridique et non pas ethnique), normative (le status de citoyen, malgré des dérogations pour des motifs religieux), institutionnelle (l’ensemble des rapports, même s’ils sont changeants, avec les sacerdoces, l’empereur, le sénat, les non romains).

Ce concept juridico-religieux des Romani-Rhomaioi est fondamental pour retrouver l’unité d’Orient et d’Occident: justement parce qu’il est différent des concepts ayant une base ethnique tels que «Latins», «Hellènes», «Grecs» et de ceux qui ont une base historiographique artificielle comme «Byzantins». Une fois encore nous faisons rappel aux sources: c’est le langage des sources juridiques en langue grecque qui est important.

La notion de Rhomaioi en tant que notion politico-juridique et non pas ethnique, persiste pendant toute l’histoire de l’Empire d’Orient et même après sa chute. On a parlé d’une «conception internationaliste de l’Empire» (N. Oikonomides). L’Empire considère comme Romains tous ceux qui sont à son service: voir l’allocution du patriarche Michel IV Autoreianos aux soldats grecs et occidentaux de Nicée: andres Rhomaioi...

Il faut aussi rappeler la «nostalgie» de la langue latine; même un empereur d’Orient typiquement «byzantin» comme Constantin VII Porphyrogénète, doué d’une vaste culture fondamentalement hellénique, regrette que «maintenant que l’Empire des Romains a été réduit et mutilé en Orient et en Occident... il est devenu grécophone, en oubliant l’emploi de la langue romaine des ancêtres».

D’autre part, c’est la foi chrétienne orthodoxe qui détermine, par excellence, la qualité de «Romain» dans la théorie politico-juridique de l’Empire d’Orient. Toutefois, contrairement à ce qui est souvent affirmé, l’élément ethnique n’est pas du tout absent de la pensée romaine orientale, il est cependant vu comme une réalité «pratique» ou «naturelle», sans caractère politico-religieux. Nous trouvons aussi une notion ethnique ou tout au moins linguistique de «Romain»: les «Romains» au sens propre sont grecs ou grécophones. Déjà aux Xe-XIe siècles on peut rencontrer dans la conscience «byzantine», toujours fondamentalement romaine et «internationaliste», cette idée de «Romain» au sens propre, équivalent à «Grec». C’est ainsi que cet emploi ambivalent du terme Rhomaios s’est introduit dans le langage des auteurs «byzantins» mettant souvent les chercheurs dans l’embarras. Cette évolution atteint son point culminant après la conquête latine de Constantinople, qui complète le schisme, et donc la séparation des deux parties de l’ancienne romanité.

C’est au dernier jour de l’Empire, dans le texte qui nous a été transmis comme exhortation finale de l’empereur Constantin XI Paléologue à ses sujets, que sont associées les deux notions: la romanité, élément politico-juridique qui assure la continuité de l’Empire, et la grécité, élément ethnique et culturel: «les descendants des Grecs et des Romains».

Il est important de confronter les conceptions universelles (politiques, religieuses, juridiques), qui reflètent l’idéologie de l’Empire (la «communauté des nations»), avec des conceptions locales, nationales, nées dans les différentes parties de l’espace que l’Empire (ou quiconque parlait en son nom) croyait être l’œkoumène romano-chrétien mais qui, souvent, ne savaient pas ou n’acceptaient pas d’y appartenir.

Il faudra étudier non seulement le point de vue de l’empereur «basileus et autocrate des Romains, c’est-à-dire de tous les chrétiens», mais aussi celui du grand prince de Moscou Vassili I qui, en 1393, affirmait: «nous avons une Eglise mais pas d’empereur»; et le Patriarche de Constantinople le corrigeait. Il est évident que s’opposaient ici les points de vue universel et local, du centre et de la périphérie. Il sera opportun de confronter «l’image du monde» dans l’Empire et dans les pays limitrophes (ou chez les peuples voisins) liés à lui par des rapports politiques et ecclésiastiques.

La conception universaliste aura sa continuité et son renouvellement dans la nouvelle réalité causée par la chute de l’Empire. La «nation» des Romains (genos ton Rhomaion, Rum Milleti) comprendra à nouveau tous les chrétiens orthodoxes, sous la juridiction du Patriarcat œcuménique de Constantinople, avec en fait la prépondérance de l’élément culturel ou ethnique grec.

6. – Universalité romaine et nationalismes.

Comme il est précisé dans le document introductif du Ier Séminaire, le but des travaux est d’étudier les principaux moments de l’histoire où, à travers l’idée de Rome, le particularisme ethnique et juridique des peuples européens a été dépassé.

Au cours du IIe Séminaire (1982) sur «Le concept de ‘romain’ entre citoyenneté et universalité» il a été mis en évidence que le mot Romanus (et ses équivalents dans les langues grecque, slaves, germaniques et néolatines) marque le cheminement juridique et religieux des hommes qui ont eu pour centres idéaux Rome, Constantinople Nouvelle Rome et Moscou Troisième Rome. Après plus de dix ans, dans une situation mondiale caractérisée par la croissance des nationalismes, surtout en Europe, le Séminaire insiste à nouveau sur le caractère universel de la tradition juridique dé Rome à la Troisième Rome qui vise l’humanité toute entière.

Rudolph von Jhering écrivit, en se référant implicitement aux problèmes du XIXe siècle: «Die welthistorische Bedeutung und Mission Roms... ist die Ueberwindung des Nationalitätsprinzips durch den Gedanken der Universalität».

Ceci peut être répété, au seuil du troisième millénaire, en référence aux nationalismes qui menacent l’Europe et le monde, mais seulement si l’on a de Rome la conception juridico-religieuse complète, qui comprend l’Occident et l’Orient. Un professeur et poète serbe a récemment écrit: «Qui a le droit de priver notre continent de la spiritualité de l’Empire romain d’Orient?» (Milorad Pavic).

L’histoire de Rome, dès sa fondation, consiste dans le dépassement des barrières ethniques. Grace à sa singulière capacité d’assimilation, bien connue, des esclaves et des étrangers, l’universalité de Rome reste telle qu’elle a été vue jusqu’à nos jours par ses ennemis (par ex. le parti nazi) et par ses amis (par ex. l’africain Senghor) et ce qu’elle est depuis les «temps de Romulus»: l’anti-race, si l’on peut ainsi s’exprimer.

La citoyenneté romaine n’est fondée ni sur l’origine ni sur le territoire. Elle peut être acquise par tous les hommes, sans différences ethniques ou religieuses.

C’est sur la citoyenneté et non pas sur un principe de territorialité que se construit la notion et la réalité de l’Empire romain (H.A. Steger, Europäische Geschichte als Kulturelle und politische Wirklichkeit. Hornruf von der anderen Seite des Limes [München 1990] 13 ss.).

7. – De Constantinople à Moscou: l’Empire chrétien de la Troisième Rome.

En Orient, l’idée d’Empire continue sans interruption et se réalise en partie à travers une concentration autocratique progressive du pouvoir impérial et une nouvelle centralisation territoriale: à Constantinople Nouvelle Rome (ainsi définie par le Concile œcuménique de 381) et, à l’époque moderne, à Moscou Troisième Rome (selon la théorie du moine Philotée de Pskov, reprise ensuite dans la «Charte constitutive» du Patriarcat de Moscou de 1589).

Du point de vue matériel (géopolitique, si l’onveut) l’inclusion des Russes dans l’œkoumène romano-chrétien est décisive: on peut dire qu’elle a été formalisée par les traités des Russes avec l’Empire Romain d’Orient.

Après la chute de la polis aux mains des Turcs, l’acte le plus important d’un point de vue formel est la reconnaissance, en 1561, par le Patriarche de Constantinople, de Ivan IV le Terrible, grand prince de Moscou, comme «Empereur des Chrétiens orthodoxes de tout l’œkoumène».

La conscience de la continuité romano-constantinopolitaine est bien présente dans la culture russe ancienne. Il suffit de rappeler que dans la Povest’ vremennych let (XIIe siècle) Vladimir le Saint est défini comme étant le «nouveau Constantin de la grande Rome».

Dans les Annales de Michail Medovarcev, qui (comme l’a observé Nina Sinicyna) sont le texte le plus ancien des annales dans lequel la légende d’Auguste est utilisée, l’histoire russe commence avec Auguste. Indirectement peut-être, l’auteur de ces annales voulait affirmer le caractère providentiel de l’Empire d’Auguste; ce caractère est clairement réaffirmé, sous différents points de vue, soit par le moine Philotée de Pskov, soit par Ivan IV le Terrible. Je me limiterai à rappeler la lettre d’Ivan IV, premier prince moscovite couronné empereur «des chrétiens orthodoxes de tout l’œkoumène», au chef des troupes polonaises (9 juillet 1577): «Le verbe de Dieu [...] glorifia Auguste César par sa divine naissance, en daignant naître sous son empire [...] il fit surgir la racine de la piété Constantin Flavius, empereur chrétien de la justice, dans l’unité de sacerdoce et empire».

Mais cet itinéraire juridique, dont la définition de Constantinople comme «Nouvelle Rome» par le Concile œcuménique de 381 est une étape essentielle, est perfectionné avec la Gramota uložennaja du Patriarcat de Moscou de 1589 (date que le Comité promoteur des Séminaires a voulu célébrer soit avec le Séminaire au Campidoglio et à Moscou, en 1989, soit avec la publication du recueil L’idea di Roma a Mosca). Il suffira de rappeler ici le nouveau titre utilisé par le Patriarche Job, dans sa lettre au Tsar géorgien Alexandre, en avril 1589: il se définissait «Patriarche de la Ville impériale Moscou et de toute la Rus’ Nouvelle Rome».

8. – Čelovek, christianskie ljudi, svjatorusskoj imperii.

La translatio imperii de la Nouvelle Rome à la Troisième Rome ne comporte pas une translatio automatique des instruments conceptuels juridiques de la civitas universelle romaine dans l’Empire œcuménique de Moscou.

Il semble qu’il manque le concept de civis; le terme a.s.e. grazdanin a.r. gorozanin indique, au sens étroitement juridique, le status des habitants de la ville, ce qui implique des obligations considérables et le droit à la liberté puisque, dans la Slavie orthodoxe comme en Allemagne, «Stadtluft macht frei».

Les termes homo et populus correspondent de façon assez précise à čelovek et ljudi. Le premier terme indique l’être humain dans son ensemble et chaque individu dont le status juridique est certain et immuable: služilyi čelovek (qui prête service), posadskij čelovek (l’habitant des faubourgs lié à sa résidence et à sa profession), kabal’nyj čelovek (l’esclave pour dette); le second terme exprime aussi bien le pluriel de čelovek qu’un concept assez semblable à celui de populus. Le peuple par excellence est celui qu’indique christianskie ljudi c’est-à-dire sans aucune connotation ethnique ou territoriale, mais s’opposant aux jazyki (ethne, gentes) dont on souhaite l’intégration dans l’Empire chrétien.

Les chrétiens dans leur ensemble constituent le carstvo (imperium, basileia), par définition non territorial. D’éventuelles connotations spatiales ou ethniques ne l’identifient pas à un territoire ou à un «peuple» particulier, mais elles soulignent son caractère œcuménique: voir chez Kurbskij: rimskoe i grečeskoe carstvo; dans la Charte constitutive du Patriarcat de Moscou (Gramota uložennaja): grečeskoe i rossiskoe carstvo.

Etre propagator est un titre de gloire pour le car’ (imperator, basileus): même Kurbskij reconnaît à Ivan IV le mérite d’avoir étendu les frontières du Saint Empire Russe (svjatorusskoj imperii). Du reste, la discussion entre le Terrible et le prince fugitif peut être vue comme l’opposition de deux modèles complémentaires: la Rome impériale et la Rome républicaine. [G. Giraudo]

9. – La citoyenneté romaine (universelle) contre la “globalisation”.

Le concept (et la politique) de citoyenneté est un aussi un élément opposant Empire et États.

La notion et la réalité de l’Empire romain ne se construisent ni sur un principe de nationalité ni sur un principe de territorialité, mais sur le principe de la croissance de la citoyenneté: civitas augescens, civitas amplianda. C’est là qu’on trouve les outils conceptuels juridiques pour la défense des hommes contre la “globalisation” (voir les volumes La nozione di “romano” tra cittadinanza ed universalità, Atti del II Seminario, Studi II, ESI, Napoli 1984; Umanità e nazioni nel diritto e nella spiritualità da Roma a Costantinopoli a Mosca, Rendiconti del XII Seminario, Herder Editrice e Libreria, Roma 1995; sur les concepts concernant l’espace, voir infra, II Urbs).

La citoyenneté romaine n’est fondée ni sur l’origine (Savigny lui aussi l’avait compris) ni sur le territoire. Tout homme, sans distinctions ethniques ou religieuses, peut l’acquérir, et elle peut s’étendre sur toute la terre (voir le volume Laicità tra diritto e religione da Roma a Costantinopoli a Mosca, Rendiconti del XIV Seminario, sous presse).

De l’asylum de Romulus sur le Capitole, créé pour accueillie au sein de la citoyenneté (cives) les étrangers libres et les esclaves, à la constitutio Antoniniana qui, en 212 ap. J.-C., étend la citoyenneté à tous les habitants du monde romain (sauf exceptions), jusqu’à la réaffirmation du favor libertatis et à l’élimination du concept de peregrinus dans la codification de Justinien: la croissance (ou l’augmentation) cohérente de la civitas continue, potentiellement universelle, sans conditionnements ethniques ou nationaux.

Voir le Document d’introduction XVI, Civitas augescens: citoyenneté et développement des peuples de Rome à Constantinople à Moscou”, 23 - 24 avril 1996 (v. Index 30, 2002, pp. 81 ss.).

 

II.

URBS[2]

1. – Le concept juridico-religieux d’urbs.

Le rite religieux du droit augural, auquel est lié le concept d’urbs, est décrit par le grand érudit, connaisseur des choses divines et humaines, Marcus Terentius Varron (né à Rieti en 116 av. J.-C.), dans un passage du De lingua Latina, V.143: «Oppida condebant in Latio Etrusco ritu multi, id est iunctis bobus, tauro et uacca interiore, aratro circumagebant sulcum (hoc faciebant religionis causa die auspicato), ut fossa et muro essent muniti. Terram unde exculpserant, fossam uocabant et introrsum iactam, murum. Post ea qui fiebat orbis, urbis principium; qui quod erat post murum, postmoerium dictum, eo usque auspicia urbana finiuntur. Cippi pomeri stant et circum Ariciam et circum Romam. Quare et oppida quae prius erant circumducta aratro ab orbe et uruo urbes; ideo coloniae nostrae omnes in litteris antiquis scribuntur urbis, quod item conditae ut Roma, et ideo coloniae et urbes conduntur, quod intra pomerium ponuntur [Dans le Latium bien des fondateurs de cité suivaient le rite étrusque: autrement dit, avec un attelage de bovins, un taureau et une vache, celle-ci sur la ligne intérieure, ils traçaient à la charrue un sillon d’enceinte (la religion leur enjoignait de le faire un jour d’auspices favorables) afin de se fortifier par fossé et muraille. Le trou d’où ils avaient enlevé la terre, ils l’appelaient fossa (fossé), et la terre rejetée à l’intérieur, ils l’appelaient murus (muraille). Derrière ces éléments, le cercle (orbis) qui se trouvait tracé formait le commencement de la ville (urbis), et comme ce cercle était post murum (derrière la muraille) on l’appela le postmoerium: il marque la limite pour la prise des auspices de la ville. Des bornes, limites du pomerium, se dressent autour d’Aricie et autour de Rome. C’est pourquoi les cités dont l’enceinte avait été tracée auparavant à la charrue, reçurent aussi le nom d’urbes (villes), mot formé sur orbis (pourtour) et sur uruum (araire). Pour la même raison, toutes nos colonies, dans les écrits d’autrefois, sont mentionnées comme urbes, du fait qu’elles avaient été fondées selon le même rite que Rome et, pour la même raison, une colonie fonde à son tour des urbes du fait qu’elle les place à l’intérieur d’un pomerium (traduction de J. Collart).

La définition juridique d’urbs est précisée, avec référence aux juristes classiques et déjà de l’époque républicaine (tels qu’Alfénus Varus) dans l’avant-dernier livre des Digesta de l’empereur Justinien, consacré à la signification des mots: Pomponius, D. 50.16.239.6 «‘Urbs’ ab urbo appellata est: urbare est aratro definire. Et Varus ait urbum appellari curvaturam aratri, quod in urbe condenda adhiberi solet»; cf. Paulus, D. 50.16.2 «‘Urbis’ appellatio muris, ‘Romae’ autem continentibus aedificiis finitur, quod latius patet»; Marcellus, D. 50.16.87: «Ut Alfenus ait, ‘urbs’ est ‘Roma’, quae muro cingeretur, ‘Roma’ est etiam qua continentia aedificia essent: nam Romam non muro tenus existimari ex consuetudine cotidiana posse intellegi, cum diceremus Romam nos ire, etiamsi extra urbem habitaremus»; Terentius Clemens, D. 50.16.147: «Qui in continentibus urbis nati sunt, ‘Romae’ nati intelleguntur»; Macer, D. 50.16.154: «Mille passus non a miliario urbis, sed a continentibus aedificiis numerandi sunt».

2. – Augustum augurium et populus Romanus.

Jupiter est le Dieu des auspicia, tant publics que privés, et les augures publici populi Romani sont interpretes Iovis Optimi Maximi (Cic. leg. 2.8.20.21).

Selon le ius élaboré par le collège sacerdotal des augures publici populi Romani, la fondation de l’urbs Roma, avec le consentement donné par Iuppiter à Romulus, précède la constitution du populus Romanus, qui est ainsi nommé précisément parce qu’il a un rapport certain avec l’urbs et avec son fondateur. Le pastorum vulgus, dont les jumeaux Romulus et Rémus sont les duces, devient, à travers la fondation de l’urbs (Roma), un ensemble de cives, populus (Romanus).

La terminologie d’Ovide (Fasti 4.806 ss.: «Ipse locus causas vati facit: urbis origo/venit...») reflète la dogmatique juridique des documents sacerdotaux: d’abord «omne pastorum sub gemino duce volgus erat», puis le rex indiqué par les aves demande et obtient le consentement pour la fondation de l’urbs, ensuite «augurio laeti iaciunt fundamina cives» et enfin Rémus se demande: «His populus tutus erit?».

Cf. Ennius Ann. 77 ss.; 502 (ed. Vahlen) «Augusto augurio postquam inclita condita Roma est»; Tite-Live 1.6.4: «Ut di, quorum tutelae ea loca essent, auguriis legerent qui nomen novae urbi daret, qui conditam imperio regeret, Palatium Romulus, Remus Aventinum ad inaugurandum templa capiunt»; 1.12.4 «Iuppiter, tuis inquit [sc. Romulus] iussus avibus hic in Palatio prima urbis fundamenta ieci»; 28.28.11 «ne istuc Iuppiter optimus maximus sirit, urbem auspicato deis auctoribus in aeternum conditam fragili huic et mortali corpori aequalem esse».

En employant la terminologie juridique actuelle, même si elle est inexacte, nous pourrions dire que la volonté divine (de Iuppiter et des Dieux qui protègent les loca) autorise, par l’intermédiaire de Romulus, la “localisation” du populus Romanus et le commencement de son “organisation juridique”. Et ceci in aeternum. Il en est de même selon la constitution Deo auctore de l’empereur chrétien qui a codifié le ius Romanum (voir infra, par. 4).

3. Urbs et principium (potissima pars).

La jurisprudence laïque utilise le concept d’urbis initia (Gaius D. 1.2.1) relié de façon évidente à la définition juridique d’urbs (voir supra par. 1).

C’est à partir du concept d’initia urbis que se développe la théorie juridico-historique que nous trouvons chez Gaius (et que reprend Justinien) selon laquelle «c’est le commencement qui est la partie la plus importante de toutes les choses» (D. 1.2.1): «Facturus legum vetustarum intepretationem necessario prius ab urbis initiis repetendum existimavi, non quia velim verbosos commentarios facere, sed quod in omnibus rebus animadverto id perfectum esse, quod ex omnibus suis partibus constaret: et certe cuiusque rei potissima pars principium est». De façon anachronique, nous pourrions dire que c’est une théorie tout à fait opposée à ce que l’on appelle la “religion du progrès” et à l’évolutionnisme.

Cette théorie juridico-historique est à la base des conceptions de civitas augescens et civitas amplianda: codifiées, respectivement, dans les Digesta Iustiniani (1.2.2.2; 7; 28) et dans les Codex Iustinianus (7.15.2). C’est sur ces conceptions que nous avons travaillé lors du XVIe Séminaire.

4. – Meliora auguria et utraque Roma.

Lisons la constitution Deo auctore: «... debere omnes civitates consuetudinem Romae sequi, quae caput est orbis terrarum, non ipsam alias civitates. Romam autem intellegendum est non solum veterem, sed etiam regiam nostram quae deo propitio cum melioribus condita est auguriis».

Selon la conception de Justinien, le consentement divin donné dans les formes de l’ancienne religion romaine (pré-chrétienne), n’est pas nié mais au contraire renforcé par la fondation de Constantinople, dont les meliora auguria expliquent l’idée juridique de utraque Roma.

5. – Constantinople nouvelle Rome.

Vers 330, a lieu un nouvel événement très important dans l’histoire de l'Empire: aux alentours de cette date se succèdent les étapes de la fondation de la capitale “romaine” d’Orient qui, pour ceux qui la réalisèrent, aurait dû constituer le “renouvellement de l’œkoumène”.

La question du caractère qui distingue la fondation de Constantinople a souvent été affrontée par la critique avec divers résultats: les rites célébrés furent-ils païens ou chrétiens ou bien est-ce que les manifestations de syncrétisme ont prévalu? Certains spécialistes ont vu, dans l’acte par lequel Constantin indique le nouveau périmètre de la ville, l’ancien rite de la limitatio; mais d’après le récit de l’“Histoire ecclésiastique” de Philostorge, un ange aurait guidé l’empereur dans son parcours. Ainsi tout détail concernant ces circonstances, considéré également à l’égard des sources plus ou moins anciennes qui le rapportent, a été attentivement pris en considération: de la statue de Pallas, en provenance de Rome par la volonté de l’Empereur, et qui aurait été ensevelie à la base de la colonne de porphyre, jusqu’à cette même colonne élevée dans le Forum de Constantin; de l’image colossale de l’Empereur en bronze doré, érigée au sommet de la colonne, jusqu’au nom d’“Anthousa” qu’il aurait donné au Genius publicus qui présidait à la destinée de la ville; du “sacrifice sans effusion de sang” dont parle Jean Lydos jusqu’aux différents éléments des cérémonies qui se déroulèrent pendant les 40 jours de réjouissances qui marquèrent l’an 330. Paganisme et christianisme semblent avoir trouvé leur expression dans la fondation de la ville sur le Bosphore. «Il cristiano Costantino, pur con la sua fede nel Dio dei cristiani, resta l’imperatore di uno stato che ha precise tradizioni giuridiche e, com’egli diceva, un mos da retinere» (S. Mazzarino): les formes du ius sacrum auraient donc été à la base de l’inauguratio, de la consecratio et de la dedicatio de la Nouvelle Rome. Ou peut-être en Constantin «prennent une unité les rites d’origine religieuse diverse qui président à la fondation; les reliques chrétiennes et les symboles païens sont réunis dans sa statue; en lui il n’existent pas les oppositions exclusives que l’histoire moderne croit reconnaître parmi les religions» (G. Dagron). On peut se demander si ceci est la ligne de recherche à suivre.

Le fait est qu’au cours de la période suivante, la Naissance de Contantinople, célébrée chaque année de façon solennelle le 11 mai, jusqu’à la fin du XIIIe siècle, sera l’occasion de nombreuses cérémonies à caractère religieux (à côté d’autres cérémonies à caractère profane); en outre les sources plus tardives tendent à christianiser chaque rite et chaque trace païenne.

 

6. – La fondation de Moscou.

À l’occasion de la fondation du temple de Jupiter Capitolin, un prodigium s’ajoute à l’augurium et de là découle la conviction de la “perpétuité” de l’imperium populi Romani: «cum omnium sacellorum exaugurationes admitterent aves, in Termini fano non addixere; idque omen auguriumque ita acceptum est non motam Termini sedem unumque eum deorum non evocatum sacratis sibi finibus firma stabiliaque cuncta portendere. Hoc perpetuitatis auspicio accepto, secutum aliud magnitudinem imperii portendens prodigium est: caput humanum integra facie aperientibus fundamenta templi dicitur apparuisse [en effet, les oiseaux permirent de désaffecter toutes les chapelles, sauf l’enclos de Terme. On prit ce présage et cet augure de cette façon: “Terme ne changeait pas de place; seul de tous les dieux il ne se laissait pas attirer hors de son emplacement consacré; c’était un signe de la solidité, de la stabilité de toute chose”. Cet auspice de durée fut suivi d’un autre prodige annonçant la grandeur de l’empire: en creusant les fondations du temple, on mit au jour, dit-on, une tête humaine dont les traits étaient intacts]» (Tite-Live 1.55.3-6).

Le prodigium du Capitole est rappelé, à propos de la Troisième Rome, dans le récit de la fondation de Moscou, Povest’ o načale Moskvy [Racconto sull’inizio di Mosca] (du XVIIe siècle): «Вся убо христианская царства в конец приидоша и снидошася во едино царство нашего государя, по пророческим книгам, то есть Российское царство: два убо Рима падоша, третий же стоит, а четвертому не быти. Поисинне же сей град именуется третий Рим, понеже и над сим бысть в зачале то же знамение, яко же над первым и вторым, аще и различно суть, но едино кровопролитне. Первому бо Риму зиждему от Рома и Ромила. И егда начаша Капетелион здати и ров копающе, обретоша главу внове закланна человека, нову и теплу кровь точащу и лице являющу к живым прилично. Ея же увидев ентинарий искусный знамением смотритель и рече, яко сей град глава будет многим, но по времени, и по заклании, и по пролитии кровей многих. Такоже и второму Риму. сииречь Константинополю зданию зачало бысть не без крове же, но по заклании и по пролитии кровей многих. Сице же и нашему сему третиему Риму, Московскому государству, зачало бысть не без крове же, но по пролитии и по заклании кровей многих. Аще бо и нецыи от окрестных стран враждующе поносят ему, сице глаголюще: “Кто убо чая или слыша когда, яко Москве-граду царством слыти и многими царствы и странами обладати?”. И сии убо немощию человеческою обложени суть, не разумеюще силы Божии, ни пророческих писаний, яко всемощен Бог и от несущаго в сущее привести, яко же искони и вселенную» [«Donc, tous les empires chrétiens sont arrivés à la fin et se sont réunis dans l’unique empire de notre souverain, selon les livres des prophètes, c’est-à-dire l’empire russe: car deux Romes sont tombées, mais la troisième est debout et il n’y en aura pas de quatrième. En vérité, cette ville est appelée troisième Rome, car au commencement, il y eut, sur elle aussi, le même signe qu’il y avait eu sur la première et sur la seconde, même si de façon différente, il y eut aussi effusion de sang. La première Rome fut fondée par Rémus et Romulus. Et, dès qu’ils commencèrent à construire le Capitole, alors qu’ils creusaient le fossé, ils trouvèrent la tête d’un homme tué depuis peu, le sang vif et chaud en coulait encore et le visage apparut semblable à celui d’un vivant. Un étrusque (cf. M.A. Salmina, “‘Entinarij’ v ‘Povesti o načale Moskvy’” [‘Entinarij” (aruspice etrusco) nel ‘Racconto sull’inizio di Mosca’], dans Trudy Otdela Drevnerusskoj Literatury [Lavori della Sezione di Letteratura Russa Antica] XV, 1958, 362 s.) expert investigateur de signes, après l’avoir vue, dit: “Cette ville sera à la tête de beaucoup d’autres, mais après des années et des années et après le sacrifice et après l’effusion de beaucoup de sang”. De la même manière, la fondation de la seconde Rome aussi, c’est-à-dire Constantinople, ne commença pas sans sang, mais après le sacrifice et après l’effusion de beaucoup de sang. C’est ainsi que commença aussi notre troisième Rome, l’état moscovite, non pas sans sang, mais après le sacrifice et après l’effusion de beaucoup de sang. Et si l’un des pays limitrophes hostile l’injurie, en disant ceci: “Qui a jamais entendu et écouté que Moscou-ville serait considérée comme empire et aurait eu le pouvoir sur de nombreux empires et pays?”. Mais ils sont enveloppés de faiblesse humaine, ils ne comprennent pas la force de Dieu, ni les écrits des prophètes, car Dieu est tout-puissant et peut porter de l’inexistence à l’existence, comme depuis le commencement l’œkoumène»[3].

7. – Mosca città «murata» e «imperiale»

A. La città murata.

Com’è stato mostrato in maniera assai convincente[4] la città russa, almeno fino alla metà del XVI secolo, non è solo un insediamento abitativo (posad), ma anche, e soprattutto, una fortezza. Mentre nei posady la differenza fra zona d’insediamento e campagna è labile, nella fortezza (krepost’), essa è netta e le mura separano nettamente ciò che è fuori dalla cerchia e ciò, invece, che ha una sua ragion d’essere all'interno di essa.

Tutta una serie di studi sui termini indicativi dei “cittadini” (gradskie ljudy, gražane, kijane, novgorodcy), ha mostrato che questi termini si riferiscono ad una realtà politico-militare: alle persone che abitano una città, che la difendono dagli attacchi e dalle insidie che l’esterno riserva, e che la governano (vedremo che quest’ultima funzione è presente in innumerevoli sfumature nelle città russe, ma vedremo anche che questa componente concettuale è comunque importantissima). Più a proposito che per altri esempi occidentali, la città russa è stata definita “città-stato”, pur con la inevitabile imprecisione che il termine comporta.

La città, infatti, è normalmente otčina di un principe, ma – a parte Mosca, che sotto questo profilo è un caso a sé – ha un’assemblea cittadina, che può addirittura, come a Novgorod, chiamare un principe o deporlo, e che decide sulle più importanti questioni. La città russa, quindi, è un’enclave ad altissimo potere di esclusione, le cui mura separano nettamente ciò che, sia dal punto di vista politico che dal punto di vista militare, è interno, da ciò che è esterno, quindi politicamente estraneo e potenzialmente pericoloso.

All’interno di questa enclave, però, nella maggioranza delle città russe, ne esiste un’altra, se possibile ancor più selettiva, il Cremlino (kreml). Si tratta di una fortezza dentro la fortezza, che separa il mondo del principe da quello dei cittadini della città che è suo patrimonio. Il Cremlino assume, da una parte, la funzione di estrema barriera contro l’esterno della città, dall’altro è un baluardo di esclusione contro la città stessa: è uno stato-città dentro la città-stato. È interessante notare, però, che proprio questo secondo meccanismo di esclusione è singolare. Se l’esterno tende ad essere nemico, altro, la stessa struttura concettuale della separazione fra interno ed esterno non implica, per quanto paradossale possa sembrare, una vera chiusura perché, se l’enclave tende ad essere un mondo a sé, questo mondo, in quanto sintesi degli orizzonti dei suoi abitanti-cittadini, tende ad includere tutti gli altri mondi, o i loro frammenti. Per capire questa apparente contraddizione – e questa è un'anticipazione di quello che dirò – e basta pensare a un’espressione frequentemente usata nelle fonti cinquecentesche: “moskovskoe carstvo impero moscovita: un impero che è connotato come città, e una città che ha le dimensioni concettuali di un impero.

L’impero romano aveva superato il suo spazio puramente cittadino per acquistarne uno universale; l’impero moscovita è l’impero di una città: una città che ha esteso il perimetro delle sue mura fino a comprendervi “tutti i cristiani sotto il cielo”.

 

B. La città imperiale.

La catégorie symbolique du “commencement” (načalo) est fondamentale dans la pensée politique qui de la Rus’ arrive à la Moscovie des XVIe et XVIIe siècles.

La Povest’ Vremennich Let, chronique de la Russie médiévale, fait remonter son origine à Noé qui partage l’œkoumène (vselennaja) entre ses fils.

L’événement fondamental du Skazanie ou knjazjach vladimirskich, qui raconte le passage du pouvoir impérial de Rome à Constantinople et enfin à Moscou, est l’élection d’Auguste comme empereur de toute la terre habitée. Et cet événement apparaît comme le fondement du commencement de la dynastie rjurikide, qui à partir de Prus, auquel Auguste donne les terres entourant la Vistule, continuera jusqu’à Jurij Dolgorukij, le fondateur de Moscou, et ensuite à ses princes-cari jusqu’à l’élection de Michail Romanov.

Du reste, dans le langage politique rempli de symboles du moyen-âge russe tardif, le thème eschatologique du “dernier empire” de la prophétie de Daniel se mêle étroitement au thème de l’origine du pouvoir universel des princes de Moscou; ce pouvoir est destiné (dans l'allocution de Makarij à Ivan IV, lors de la cérémonie du couronnement, en 1547) à unifier tous les peuples sous la vraie foi et permettre ainsi l'avènement final du Christ.

La fondation de Moscou revêt donc une importance qui va au-delà de la simple circonstance de la naissance d'une nouvelle ville parmi les nombreuses villes russes. Tant dans la pratique que dans la théorie politique. Dans la pratique politique Moscou apparaît à sa naissance comme une ville appartenant à un prince, son otčina si profondément possédée qu'elle n'avait pas un ve¥e, l'assemblée populaire dont le pouvoir en faisait le contre-poids du pouvoir du prince. Dans la théorie politique moscovite Moscou naît comme carstvujuščij grad, ville impériale qui domine exactement comme Constantinople avant sa chute: une ville dont le commencement est aussi le commencement du processus destiné à conduire l’humanité vers sa fin. C’est vers ce but que le prince, selon la théologie politique russe dérivée de la théologie romaine d’Orient, doit conduire son peuple: le salut éternel dans la vraie foi.

Ainsi, n’est-il pas paradoxal que c’est précisément dans les tatares que le petit bourg, fondé en un lieu dévasté peu après par ces derniers (qui auraient “infesté la terre comme le ciel est infesté par les oiseaux de l’air”) puise les forces qui en feront une ville unificatrice et le caput d’un empire multi-ethnique qui devra faire en sorte que l’idée ‘patrimoniale’ de l’otčina soit dépassée par l’idée ‘fonctionnelle’ de l’empire universel.

I due rami di un’unica teoria, quella dei successori di Augusto e dei doni del Monomaco, da una parte, e quella di Mosca-Terza Roma, dall'altra, si integrano in un'unica storia che si proietta da un passato remoto sino alla fine dei tempi, e dalla cronaca dell'azione della mano di Dio nel mondo verso la storia del futuro. Per rimanere all’interno della logica simbolica suggerita proprio da Ivan il Terribile e dal suo trono, entrambe le teorie tendono a stabilire un terri­torio del potere dello Car’ che sta all'interno dei cerchi concentrici che ho tracciato all'inizio: città, fortezza, cattedrale, trono-iconostasi e in­fine ecumene. Cerchi che, nel momento in cui sono tracciati, divengono sfere capaci di comprendere l'universo (vedi le fonti raccolte nel volume L’idea di Roma a Mosca secoli XV-XVI. Fonti per la storia del pensiero sociale russo, redattori P. Catalano e V. Pašuto, Herder, Roma 1993). [G. Maniscalco Basile]

8. – Moscou et les villes. Les "citoyens" (graždane).

À l’époque de la feodal’naja razdroblennost’, les villes avec leurs domaines constituaient des udely (“apanage”); d’habitude les (Grands) Princes léguaient leur titre à un de leurs fils et partageaient les villes entre tous leurs fils. Le processus de centralisation, entamé par Ivan III et accompli par son petit-fils, crée le russkoe carstvo (Empire de la Rus’) et le rossijskoe gosudarstvo (État de Russie).

Les villes de Russie relèvent du domaine du gosudarstvo: elles sont les lieux où résident l’évêque, le namestnik (diάdocoV) (ensuite voevoda στρατηγός), qui cumule les fonctions administratives, financières, militaires et judiciaires.

Après la réforme de l’appareil central et périphérique de l’administration par Ivan IV, les villes deviennent les lieux où siègent les pouvoirs locaux (délégués), tandis que les plus hautes instances sont concentrées à Moscou. Les rapports entre la Capitale et les unités administratives locales sont résumés par la formules na Moskve i v gorodech (“à Moscou et dans les villes”).

Dans les villes vivent des ljudi de tous les činy (“rangs”), qui se distinguent de leurs homologues de Moscou par un ‘status’ inférieur et qui sont indiqués par les termes iz gorodov, gorodskoj, gorodovoj, gradskij.

Le terme graždanin indique toute personne vivant dans une ville et ayant un ‘status’ juridique défini: les služilye, qui sont au service de l’État et reçoivent des gages; les neslužilye tjaglye, qui ne sont pas au service de l’État et paient des impôts. Dans la Povest’ o začale Moskvy, on lit que le Prince Daniil “peupla Moscou d’hommes de ville” (graždany naseli), ce qui résume d’une façon très précise le système des rapports sociaux dans le Rossijskoe gosudarstvo / Russkoe carstvo. [G. Giraudo]

 

III.

POPULUS DEI

1. – Iuppiter omnipotens et le Peuple romain.

L'"omnipotence" est explicitement considérée comme une caractéristique de Jupiter, à partir tout au moins de la théologie, "civile", d'Ennius et de Virgile. Les vers de Quintus Valerius Soranus, tribun de la plèbe en 82 av. J.C., sont rapportés par Varron et ensuite par Saint Augustin (civ. Dei 7.9): «Iuppiter omnipotens regum rerumque deumque / Progenitor genetrixque deum, deus unus et omnes». (Jupiter tout puissant, père et mère des rois, des choses et des dieux, / Père et mère des dieux, seul Dieu et à lui seul tous les dieux) [trad. de J. Perret].

L'"omnipotence" est implicite dans la position du Dieu au sommet du système juridico-religieux; elle est évidente du point de vue du ius augurium et du ius fetiale.

La potestas des Dieux (Liv. 8.9.4-8), et en particulier celle de Jupiter, est immédiatement suivie, tout au moins pendant la période républicaine, de la potestas du populus (Cic. har. resp. 6.11; Rabir. perd. 5). De là dérive, comme caractéristique de la République, la nette distinction, due à la différence de fondement, entre le pouvoir des sacerdotes et le pouvoir des magistratus: seul ce dernier est relié, par la lex curiata, aux auspicia populi, et donc à la potestas du Peuple romain réuni en Assemblée.

Jupiter est le Dieu des auspicia, tant publics que privés, et les augures publici populi Romani sont interpretes Iovis Optimi Maximi (Cic. leg. 2.8.20.21). La tradition de l’augur Attus Navius rapporte des faits miraculeux confirmant la disciplina, et le choix du lieu pour le temple de la triade capitoline est le seul augurium stativum ayant une valeur normative reconnue par le ius augurium.

Jupiter est le Dieu des traités et des déclarations de guerre (Liv. 1.24.7-8; 1.32.6-10) puisque c'est une divinité que nous appellerions aujourd’hui "inter-ethnique" ou "universelle". Et même du point de vue du ius fetiale, le rôle des assemblées populaires est central pour la paix et pour la guerre.

2. Auspicia populi et distinction entre magistratures et sacerdoces.

De la formule de precatio chez Tite-Live 29.27, 1 ss. ainsi que de Tite-Live 30.14.8, il résulte que le populus Romanus est titulaire d’auspicia. Cette signification du terme auspicia populi ne s'explique qu'en tenant compte d'un côté du concept général d’auspicia comme «projections» de pouvoirs humains sur le plan du droit divin, et de l'autre du concept «concret» de populus, c'est-à-dire comme unité-pluralité de citoyens. A l'intérieur du concept général d'auspicia, il faut retrouver un concept plus restreint, justement le concept des auspicia propres des citoyens, en tenant compte que chaque citoyen (pater familias ou filius familias) est capable de consulter Iuppiter pour ce qui est de ses activités. A Rome, il n'y a monopole (ni des prêtres ni de la magistrature) de la divination augurale, contrairement à ce que l'on trouve dans d'autres sociétés, pour certaines techniques divinatoires.

Les auspicia populi sont à la base des auspicia magistratuum, qui sont donc également appelés auspicia populi (dans la seconde acception de cette expression, que l'on trouve chez Cicéron, De domo 14.38; De nat. deor. 2.4.11) ou auspicia publica (Tite-Live 4.2.5). L'adjectif publicus se rapportant aux auspicia des magistrats conserve son sens originel (= populi, 'du peuple'), qui est différent du sens qu'il pourrait avoir s'il se rapportait aux auspices des sacerdotes publici populi Romani, qui peuvent être appelées auspices de privati (v. Cicéron, De div. 1.40.89).

Cette différence s'explique par le fait que ce sont les auspicia des magistrats, et non ceux des prêtres, qui se fondent sur les auspicia des citoyens, c'est-à-dire du peuple.

L'exclusion du vote du populus de l'investiture des sacerdotia marque la nette distinction existant entre le fondement des pouvoirs des magistrats et celui des pouvoirs sacerdotaux.

3. "Laïcisation" de la jurisprudence e "Isolierung" du droit.

Le système romain ancien, soit pré-chrétien soit chrétien, ignore l'isolement du droit par rapport à la morale ou à la religion. Il n'y pas d'isolement du droit pendant la période républicaine («ius civile in penetralibus pontificum repositum erat»: Tite-Live 4.3.9) ni dans l'Empire chrétien («publicum ius in sacris, in sacerdotibus, in magistratibus consistit»: D. 1.1.1). Quant à la jurisprudence, la définition contenue chez D. 1.1.10.2 est significative: «divinarum atque humanarum rerum notitia, iusti atque iniusti scientia».

En outre, il vaut la peine de réfléchir sur ce qu'on a appelé la "sécularisation du droit". Au III siècle a.C., Tibère Coruncanius, le premier plébéien qui eut la dignité de pontifex maximus, commença primus publice profiteri (Pomponius, D. 1. 2.2.35 et 38). «La notizia è importante, perché se il diritto civile era stato nel diritto precedente in penetralibus Pontificum, il Collegio non poteva essere proclive a diffondere la conoscenza del diritto pubblico. Invece al tempo di Coruncanio la conoscenza del diritto era già diffusa nel popolo» (Riccobono).

Dans la doctrine romaniste, l'emploi du terme "laïc" pour les juristes non sacerdotes est courant (on parle de laïcisation de la jurisprudence).

Des expressions telles que "laïcisation du procès", "laïcisation de la sanction", apparaissent moins précises.

4. Laos et ethne dans le Nouveau Testament.

Dans le corpus de Paul, par laos (populus) on indique le peuple judaïque; le mot est même employé dans le cadre de citations tirées de l'Ancien Testament (v., par ex. Rom. 9.22-28). En partant de là, Paul ouvre un plus vaste horizon: pour lui, quand les Juifs refusent la parole de Dieu, laos désigne aussi celui qui parmi les païens n'appartient pas par sa naissance aux Israëlites, mais accueille l'appel de Dieu lui-même. Dans ce sens, le peuple de Dieu (laos Theou; populus Dei ou plebs Dei) réunit toute l'humanité et a une dimension universelle.

Par ethnos - au pluriel ethne - les lettres de Paul indiquent "les gens", les "païens", autrement dit ceux qui ne font pas partie du peuple judaïque, en latin les nationes les gentes.

Le peuple héritier de la promesse de Dieu, la portion d'hommes qui participent de l'héritage du Christ, à partir du moment où ils sont marqués par le sceau de l'Esprit Saint, sont appelés kleros (cf. I Petri 5.2-3), un terme qui à l'origine n'indique donc pas, comme il le fera par la suite, celui qui a une responsabilité de gouvernement dans l'Eglise. Même si le kleros est confié au bons soins de "surveillants" (episkopoi), d'"anciens" (presbiteroi) qui proviennent du laïcat et n'ont rien à voir avec les prêtres juifs.

Dans l'Ancien Testament, il existait un système de séparations, visiblement représenté dans l'organisation du Temple de Jérusalem. L'accès au lieu saint était règlementé. Les laïcs avaient accès qu'aux parties extérieures. Pour s'approcher de Dieu il fallait avoir des médiateurs: les prêtres consacrés de façon particulière au culte divin; et certains d'entre eux n'avaient accès qu'à l'espace antérieur du sanctuaire, tandis que le grand prêtres pouvait entrer dans le saint des saints, une seule fois par an. Il y avait donc une nette séparation entre les "laïcs" c'est-à-dire le peuple dans son ensemble et le prêtre.

Jésus conteste ce système de séparations cultuelles qui, sous des formes diverses, s'étend à différentes manifestations de la vie devant lesquelles il se comporte très librement: il mange avec les publicains, il touche les lépreux, il pardonne les péchés, il interprète d'une façon nouvelle la signification du samedi. Il fréquente le Temple mais il n'appartient pas à la tribu de Judas et donc il n'est pas prêtre selon la Loi; il fréquente le Temple, mais il le fait pour ainsi en tant que "laïc". Dans le cadre des communautés chrétiennes, ceci fit démarrer un processus en mesure d'expliquer des résultats qui deviendront visibles des siècles après et qui auront, dans les temps modernes, des résultats ultérieurs.

La laïcité est étroitement liée au laïcat, le peuple dans son ensemble, comme le prouve aussi l'histoire des termes laos – populus en Orient et en Occident. C'est la période où le Christianisme affronte un premier grand adversaire, le Gnosticisme, qui prêche un homme désincarné, indifférent, si ce n'est contraire à tout ce qui est le monde - parce que le vrai destin du moi est acosmique - un homme entièrement en dehors de la civitas et de ses problèmes. «En vainquant la Gnose le Christianisme sauva l'Occident et l'Hellénisme qui ne pouvait, à lui seul, opposer aucune résistance» (H.W. Russel).

Dans les communautés chrétiennes les plus anciennes la mesure de la laïcité par rapport à la politique et à la société est donnée d'abord par le témoignage des martyrs qui affirment la liberté intérieure et les droits de la conscience et poursuivent dans le concret la distinction entre sphère politico-civile et sphère religieuse: distinction qui n'est pas séparation et encore moins refus de la première de la part de la seconde. Ce n'est pas un refus du programme politico-idéal de l'Empire, mais un refus du polythéisme par lequel il se manifestait. L'affirmation de la part des chrétiens que la valeur de la société humaine en soi et pour soi est irremplaçable reste complète. [P. Siniscalco]

5. – Peuple de Dieu.

Il est évident que si, dans l'Empire d'Orient, l'élément monarchique pouvait bien avoir comme point de référence le monothéisme, cette "monarchie" de Dieu, en revanche les vestiges romains "républicains" n'y sauraient jamais faire référence, en contrepartie, à des modèles "polythéistes". Dans ces cas-là, on recherche plutôt des modèles de "collectivité" ou de "collégialité" dans la doctrine chrétienne de l'Eglise, corps mystique du Christ, qui fait des fidèles de vrais membres de ce corps – doctrine évangélique («Je suis la vigne, vous, les sarments» Jean 15.5) et paulinienne («son Corps qui est l'Eglise» Col. 1.24; «De même, en effet, que le corps est un, tout en ayant plusieurs membres, et que tous les membres du corps, en dépit de leur pluralité, ne forment qu'un seul corps, ainsi en est-il du Christ… Aussi bien le corps n'est-il pas un seul membre mais plusieurs … Si le tout était un seul membre, où serait le corps? Mais, de fait, il y a plusieurs membres, et cependant un seul corps… pour qu'il n'y ait point de division dans le corps, mais qu'au contraire les membres se témoignent une mutuelle sollicitude. Un membre souffre-t-il? Tous les membres souffrent avec lui. Un membre est-il à l'honneur? Tous les membres se réjouissent avec lui. Or, vous êtes, vous, le corps du Christ et membres chacun pour sa part» I Corinth. 12.12-27; «Ne savez-vous pas que vos corps sont des membres du Christ?» ibid. 6.15; «Ne sommes-nous pas les membres de son corps?» Ephés. 5.30), reprise dans toute la littérature patristique, surtout celle de l'Orient grec. Ou on a recours au modèle trinitaire lui-même: le peuple de Dieu reflétait la communion qui existe entre les Personnes de la Trinité. Surtout les mystiques de l'Eglise d'Orient soulignent cette communion, comme l'appartenance mutuelle de l'un à l'autre, l'"interpénétration" (allêloperichôrêsis); c'est toujours saint Paul qui est cité: «ne sommes-nous pas membres les uns des autres?» (Ephés. 4.25: allêlôn melê). Dans les litanies liturgiques de l'Eglise d'Orient une phrase, presque intraduisible dans sa structure grammaticale grecque, se répète constamment: «…confions-nous nous-mêmes et les uns les autres et toute notre vie au Christ notre Dieu» (heautous kai allêlous kai pasan tên zôên hêmôn Christôi tôi Theôi parathômetha). Le "peuple romain" maintenant déguisé, comme nous venons de le dire, en corps ecclésial, en "peuple de Dieu". [P. Siniscalco]

6. La notion de laïcité.

Le terme "laïcité" naît à l'époque moderne et on ne le retrouve dans aucune source ancienne. Il dérive de l'adjectif grec laikos (qui à son tour donne naissance à son correspondant latin laicus) et du substantif grec laos = peuple. C'est justement en tenant compte de cette racine que nous entendons effectuer notre recherche: dans un horizon très vaste, car éthimologiquement "laïc" signifie celui qui appartient au peuple, celui qui est membre du peuple. Sans vouloir pour cela cacher les nombreuses significations que le mot a pris aujourd'hui dans la conscience linguistique commune.

"Laïque" est la condition, l'état, la qualité d'une personne qui, dans une perspective chrétienne, n'appartient ni au clergé ni à un ordre ou à une congrégation religieuse. Mais aujourd'hui, dans le langage profane, "laïc" désigne aussi celui qui s'inspire du laïcisme, c'est-à-dire de l'ensemble d'attitudes et de conceptions qui revendiquent la complète autonomie des valeurs temporelles vis-à-vis des valeurs religieuses (telles qu'elles sont notamment proposées par les religions positives). Néanmoins "laïcité" désigne aussi l'attitude de celui qui, retenant nécessaire la distinction entre domaine politico-civil et domaine religieux, ne revendique cependant pas son propre désintéressement ou son refus d'un domaine au détriment de l'autre.

Donc "laïcité" comprise aussi comme "nouveauté" introduite dans l'histoire par le Christianisme, qui se base sur le principe exprimé dans Matth. 15-22: «Reddite ergo quae sunt Caesaris Caesari, et quae sunt Dei Deo».

On souligne donc, grâce à l'ampleur des significations qu'ont eues, au cours de l'histoire, les termes "laïc" et "laïcité", le danger et l'ambiguïté de l'emploi de concepts modernes et en même temps la nécessité de ramener le problème de la laïcité au plan juridique en l'interprétant dans son processus historique. [P. Siniscalco]

7. – Etre suprême et "religion civile" (Rousseau, Robespierre, Mazzini).

De différents points de vue et quelquefois selon l'instrumentalisme politique, les idées de monothéisme sont présentes dans le développement moderne de l'Occident. Le théisme du XVIIIe siècle, jusqu'à la proclamation du culte de l'Etre suprême pendant la Révolution française, en est un exemple.

Examinons en particulier la pensée religieuse démocratique, qui va de Jean-Jacques Rousseau à Maximilien Robespierre: c'est-à-dire de la définition du modèle romain de la "religion civile" (J.J. Rousseau, Contrat social, livre IV, ch. VIII) jusqu'au culte de l'Etre suprême: «Cicéron… invoquait contre les traîtres et le glaive des lois, et la foudre des dieux» (Maximilien Robespierre, Discours du 7 mai 1794: Œuvres, X, 452 ss.).

Après avoir affirmé que le peuple romain est le «modèle de tous les peuples libres», Rousseau avait redessiné, justement comme modèle, dans le IV Livre du Contrat social, la constitution romaine, dont la "religion civile" est une partie essentielle (chapitre final). De façon cohérente avec cette pensée, l'avocat Maximilien Robespierre lie étroitement religion et révolution: «L'athéisme est aristocratique; l'idée d'un grand être qui veille sur l'innocence opprimée, et qui punit le crime triomphant, est toute populaire. Le peuple, les malheureux m'applaudissent» (discours Pour la liberté des cultes à la Société des Amis de la Liberté et de l'Egalité, 1 frimaire An II-21 novembre 1793); «Honorer la Divinité & punir les rois, c'est la même chose. Et quel peuple rendit jamais un culte plus pur que le nôtre au grand Etre sous les auspices duquel nous avons proclamé les principes immuables de toute société humaine?» (Réponse de la Convention nationale au manifeste des rois ligués contre la République, proposée par Robespierre, au nom du Comité de salut public, 15 frimaire An II-5 décembre 1793). Toujours dans le dernier discours, le 8 Thermidor, Robespierre exalte le décret du 18 floréal, qui avait établit la liberté du culte: «Vous avez sauvé la patrie; votre décret du [18 floréal] est lui seul une révolution; vous avez frappé du même coup l'athéisme et le despotisme sacerdotal» (Contre les factions nouvelles et les députés corrompus, 8 thermidor An II-26 juillet 1794). C'est le point culminant de la Révolution française.

Rousseau avait durement critiqué Grotius (Hugo de Groot, le juriste de ce qui a été défini la première révolution bourgeoise, la révolution des Pays-Bas); à propos du problème de l'esclavage, Rousseau avait observé: «Sa plus constante manière de raisonner est d'établir toujours le droit par le fait», ajoutant: «On pourrait employer une méthode plus conséquente, mais non pas plus favorable aux Tirans» (Contrat social, Livre I, ch. II). On sait que Grotius affirmait que le droit naturel existerait même si nous osions penser que Dieu n'existe pas ou qu'il ne s'occupe pas des vicissitudes humaines (De iure belli ac pacis, Prol. 8-12). A l'opposé, Maximilien Robespierre, en suivant la voie de la "religion civile", en arrive à mettre en rapport l'athéisme avec l'aristocratie et la monarchie: «L'athéisme est aristocratique; l'idée d'un grand être qui veille sur l'innocence opprimée, et qui punit le crime triomphant, est toute populaire»; «Honorer la Divinité et punir les rois, c'est la même chose. Et quel peuple rendit jamais un culte plus pur que le nôtre au grand Etre sous les auspices duquel nous avons proclamé les principes immuables de toute société humaine?» (Œuvres, X, 196 s.; 228 s.). Les "auspices" de l'Etre suprême ne contrastent pas avec la souveraineté du peuple, mais au contraire ils lui donnent un fondement.

Rappelons que G. van der Leeuw a déjà commencé une réflexion, du point de vue de la phénoménologie, sur la pensée de Maximilien Robespierre, notamment en ce qui concerne l'Etre suprême. Ajoutons qu'une comparaison correcte exige un emploi philologique précis du terme "religion civile", qu'il faut rapporter toujours et seulement à des croyances, importantes pour la civitas, en une réalité divine (Dieux, Dieu, Etre suprême). Il faut absolument éviter la confusion, hélas fréquente, avec différents concepts, que l'on peut désigner comme "religions de la patrie" ou "religions politiques", qui se rapportent, de différentes façons, aux totalitarismes sans référence à des réalités transcendantes.

Cette comparaison nous permet de mettre en évidence la continuité de la pensée religieuse à partir de Rousseau jusqu'à Mazzini. Giuseppe Mazzini a écrit: «Lasciate ch'altri tenti persuadervi la rassegnazione passiva, l'indifferenza alle cose terrene, la sommessione ad ogni potere temporale anche ingiusto, replicandovi, male intese, quell'altra parola: "rendete a Cesare ciò che è di Cesare e ciò ch'è di Dio a Dio". Possono dirvi cosa che non sia di Dio? Nulla è di Cesare se non in quanto è conforme alla Legge Divina. Cesare, ossia il potere temporale, il governo civile, non è che il mandatario, l'esecutore, quanto le sue forze e i tempi concedono, del disegno di Dio: dove tradisce il mandato è vostro, non diremo diritto, ma dovere, mutarlo [...] senza Dio, donde il Dovere? Senza Dio, voi, a qualunque sistema civile vogliate appigliarvi, non potete trovare altra base che la Forza cieca, brutale, tirannica […] Senza Dio, non v'è altro dominatore che il Fatto» (Dei doveri dell'uomo, cap. II, "Dio").

C'est dans cet esprit qu'en 1999 nous avons célébré au Capitole le cent cinquantième anniversaire de la République Romaine, dont Giuseppe Mazzini fut l'un des triumvirs.

A ce que Marx appellera la "romanité ressuscitée" des Jacobins, on doit donc une nouvelle expression de liberté religieuse qui rappelle l'édit de Milan. Napoléon, couronné empereur en présence du Pontife romain, suivra au contraire la voie du Concordat.

Enfin au XX siècle, un autre paradoxe apparent: grâce à la Révolution russe on a eu le rétablissement du Patriarcat à Moscou troisième Rome!

 

 

IV.

«Dio e Popolo». Roma e Giuseppe Garibaldi

(alcuni testi)[5]

 

All’Assemblea Nazionale Romana, 5 febbraio 1849

 

«Io credevo che il popolo romano non avesse bisogno di seguire gli esempi di popoli suoi discepoli, sia degl’inglesi, per esempio, de’ francesi, ecc. Il popolo romano ha degli esempi e de’ modelli nella sua storia; in conseguenza il popolo romano poteva passar sopra certe forme […] Il popolo lasci l’adulazione da parte: si rinunci alle forme; di qui in avanti si esiga che le parole siano laconiche: Repubblica – Repubblica: Dispotismo – Dispotismo. I romani non abbisognano degli esempi di alcuno; hanno gli esempi de’ loro antenati».

 

 

Memorie (1872)

 

«Ora assistevo alla rinascita del gigante delle Repubbliche! la Romana! Sul teatro delle maggiori grandezze del mondo! Nell’Urbe! Che speranze, che avvenire! Non eran dunque sogni, quella folla d’idee, di vaticini, che avea fantasticato nella mia mente dall’infanzia, nella mia immaginazione di diciotto anni, quando per la prima volta vagai tra le macerie dei superbi monumenti della Città eterna; quelle speranze di risorgimento patrio, che mi fecero palpitare nel folto delle foreste Americane e nelle tempeste degli Oceani, che mi guidarono al compimento de’ miei doveri verso i popoli oppressi, soffrenti! Lì, liberamente, nell’aula stessa ove si adunavano i vecchi tribuni della Roma dei Grandi, eravamo adunati noi, non indegni forse degli antichi padri nostri se presieduti dal genio, ch’essi ebbero la fortuna di conoscere e di acclamare sommo! E la fatidica voce di Repubblica risuonava nell’augusto recinto, come nel dì che ne furono cacciati i re per sempre».

 

 

I Mille

 

«Roma! Alle cui ispirazioni certamente io devo il poco operato nella tempestosa mia vita».

 

 

Considerazioni politico-militari

 

«Poiché niuno oggi ignora ch’io sono il solo mandatario legale del popolo Romano sotto il titolo di Generale Romano con pieni poteri costituiti dal Governo della Repubblica Romana proclamata dal suffragio universale».

 

 

Discorso del 29 gennaio 1875

 

«L’aquila romana io la porto scolpita nel cuore: l’aquila ricorda le gloriose vittorie dell’Italia: ma oggi essa non è più simbolo di conquista, ma di lavoro, di progresso, di civiltà».

 

______________________________

 

XXVII-Terza-Roma-2

 

Programma

 

Campidoglio, 19-21 aprile 2007

 

Giovedì 19 aprile, ore 9 – Sala Giulio Cesare

SEDUTA INAUGURALE

 

Discorso di JEAN-LÉONARD TOUADI, Assessore alle Politiche giovanili, ai rapporti con le università e alla sicurezza del Comune di Roma

 

Discorso di ANDREJ N. SACHAROV, Direttore dell’Istituto di Storia Russa dell’Accademia delle Scienze di Russia

 

Intervento di ANDREA DI PORTO, Direttore del Dipartimento “Identità culturale” del CNR

 

Intervento di ROMANO CIPOLLINI, Presidente della Commissione per la ricerca scientifica di ateneo dell’Università di Roma ‘La Sapienza’

 

Relazione di ROBERT TURCAN, dell’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, Parigi: L’Empire et le Genius populi Romani

 

MMD ANNIVERSARIO DEL GIURAMENTO DELLA PLEBE AL MONTE SACRO

 

Relazione di FELICIANO SERRAO, Direttore onorario del Corso di Alta Formazione in Diritto romano dell’Università di Roma ‘La Sapienza’

 

Intervento di MARIO MAZZA, Presidente dell’Istituto Nazionale di Studi Romani

 

 

Giovedì 19 aprile, ore 16 – Sala del Carroccio

URBS

 

Presiede EUGENIO LA ROCCA, Sovraintendente ai Beni Culturali del Comune di Roma

 

Comunicazioni

 

FRANCESCO SINI, dell’Università di Sassari: Urbs: concetto e implicazioni normative nella giurisprudenza

ATTILIO MASTROCINQUE, dell’Università di Verona: L’urbs e l’asilo

GIANFRANCO GIRAUDO, dell’Università di Venezia: Mosca Terza Roma e le città

VINCENZO POGGI, del Pontificio Istituto Orientale, Roma: Una “Terza Roma” in Persia?

TEODOR SÂMBRIAN, dell’Università di Craiova: Roma nella conoscenza romena (XVII- XVIII sec.)

VLADISLAV ZYPIN, dell’Accademia Teologica, Mosca: La città nei canoni della Chiesa Ortodossa

MARIA PIA BACCARI, della Libera Università ‘Maria Ss. Assunta’, Roma: Dall’urbs alla comunione dei popoli

 

Dibattito

 

 

Venerdì 20 aprile, ore 9 – Sala della Protomoteca

RES PUBLICA

 

Presiede ROBERTO ANTONELLI, Preside della Facoltà di Scienze Umanistiche dell’Università di Roma ‘La Sapienza’

 

Comunicazioni

 

GIOVANNI LOBRANO, dell’Università di Sassari: Res publica nella giurisprudenza

ANTONIO CARILE, dell’Università di Bologna: La democratia a Costantinopoli nuova Roma

CONSTANTINOS PITSAKIS, dell’Università della Tracia, Komotini: Politeia dans le droit gréco-romain

V.V. FOMIN, dell’Accademia delle Scienze di Russia, Mosca: Il popolo e il potere nell’epoca della formazione dello Stato nell’Oriente slavo

GIOVANNI MANISCALCO BASILE, dell’Università ‘Roma Tre’: Popolo e Czar

SILVIA RONCHEY, dell’Università di Siena: Continuità geopolitica dell’Impero romano

ILBER ORTAYLI, Direttore del Museo del Palazzo di Topkapi: Le concept populus-reaya dans l’Empire ottoman

LAURENT REVERSO, dell’Università François Rabelais, Tours: La “sovranità” del popolo in Bodin

 

Dibattito

 

 

Venerdì 20 aprile, ore 16 – Sala della Protomoteca

POPULUS DEI

 

Presiede SERGIO ZINCONE, della Facoltà di Lettere e Filosofia dell’Università di Roma ‘La Sapienza’

 

Comunicazioni

 

ELENA TASSI, dell’Università di Roma ‘La Sapienza’: Iuppiter, auspicia populi, imperium

ALBA MARIA ORSELLI, dell’Università di Bologna: Plebs Dei e populus della città nei vescovi del Tardoantico

OTTORINO PASQUATO, dell’Università Pontificia Salesiana, Roma: Il popolo di Dio a Costantinopoli (IV-V sec.)

CESARE ALZATI, dell’Università Cattolica del Sacro Cuore, Milano: Clerus e populus nella scelta della giurisdizione ecclesiastica (VI-VII sec.)

IVAN BILIARSKY, dell’Accademia delle scienze di Bulgaria, Sofia: Le peuple élu et les idées de l’Etat et du pouvoir en Bulgarie haute-médiévale

RAFFAELE COPPOLA e CARMELA VENTRELLA MANCINI, dell’Università di Bari: Identità religiosa e popolo cristiano nella Tradizione

 

Dibattito

 

 

Sabato 21 aprile, ore 9 – Sala della Protomoteca

 

SEDUTA CONCLUSIVA

BICENTENARIO DELLA NASCITA DI GIUSEPPE GARIBALDI

 

Presiede MAURO FERRI, Presidente emerito della Corte Costituzionale

 

Relazione introduttiva ROMANO UGOLINI, Vicepresidente dell’Istituto per la Storia del Risorgimento italiano: Garibaldi e il popolo romano

 

Comunicazioni

 

DAN BERINDEI, Vicepresidente dell’Accademia Romena, Bucarest: Garibaldi et les Roumains

FRANCESCO GUIDA, dell’Università ‘Roma Tre’: Garibaldi e la Grecia

VLADISLAV JA. GROSUL, dell’Accademia delle Scienze di Russia, Mosca: Garibaldi e la Russia

LAURA NAY, dell’Università di Torino: “L’idillio della morte”: Garibaldi, Giovagnoli e Ozar gladiatore tagico

ANNA MODIGLIANI, dell’Università della Tuscia, Viterbo: Il popolo romano nel pensiero e nell’azione del Tribuno Cola di Rienzo

 

Dibattito

 

Conclusioni del XXVII Seminario

Interventi dei coordinatori ANDREJ N. SACHAROV, PIERANGELO CATALANO, PAOLO SINISCALCO

 

 



 

* Questo Promemoria è stato redatto sulla base dei Documenti introduttivi dei primi venticinque Seminari, pubblicati nella Collana “Da Roma alla Terza Roma” e nella rivista Index; i paragrafi I, 8; II, 8 sono scritti da Gianfranco Giraudo (Università di Venezia); i paragrafi I, 1-2 da Giovanni Lobrano (Università di Sassari); i paragrafi Introduction, 2-3; II, 7 da Giovanni Maniscalco Basile (Università Roma Tre); i paragrafi III, 4-5-6 da Paolo Siniscalco (Università di Roma “La Sapienza”).

La traduzione francese è di Marie Rose Mezzanotte (Università di Sassari).

 

[1] Voir P. Catalano, Populus Romanus Quirites, Torino 1974; G. Lobrano, Res publica res populi, Torino 1996; P. Catalano, “Civitas romana. Profondeur sociale et ouverture à l’autre”, dans Index 23 (1995), 485 ss., et aussi dans Méditerranées, 13-1997 (Individu et pouvoir), 63 ss. ; M. Cacciari, “Il mito della civitas augescens”, dans Il Veltro. Rivista della civiltà italiana, 2-4, 1997, 161 ss.; cf. M.P. Baccari, “Il concetto giuridico di civitas augescens: origine e continuità”, dans Studia et Documenta Historiae et Iuris 61(1995) 759 ss.; Ead., Cittadini popoli e comunione nella legislazione dei secoli IV-VI, Torino 1996, 55 ss.; Ead., “Civitas augescens. Le principe juridique de la croissance de la cité”, dans Actes du Séminaire International Polis, démocratie et politique. Conférence permanente des Villes historiques de la Méditerranée – Sparte, 29 mars-1er avril 2001 (= ICOMOS, Journée mondiale des monuments. Questions du développement et du monitoring des villes historiques au 21e s., Athènes 2002), 341 ss.; aussi dans Méditerranées. Revue du Centre d’Études Internationales sur la Romanité 33 (2002) 37 ss.

 

[2] Voir P. Catalano, “Aspetti spaziali del sistema giuridico–religioso romano. Mundus, templum, urbs, ager, Latium, Italia” in Aufstieg und Niedergang der Römischen Welt, II, 16, 1, Berlin - New York 1978, 440 ss.

 

[3] Voir Идея Рима в Москве XV-XVI века. Источники по истории русской общественной мысли, редакторы П. Каталано, В.Т. Пашуто. L’idea di Roma a Mosca. Secoli XV-XVI. Fonti per la storia del pensiero sociale russo, a cura di P. Catalano, V.T. Pašuto, (Da Roma alla Terza Roma – Documenti 1), Herder, Roma 1993, p. 194.

 

[4] Cfr. Sacharov, O termine "gorod" v istočnikach XVI v., in Obščesvo i Gosudarstvo feodal'noj Rossii, Moskva 1975, 62-66.

 

[5] Cfr. Garibaldi e l’antichità. Testi e dizionario storico, a cura di Maria Capozza, Herder Editrice e Libreria, Roma 2002.