La
continuité territoriale de la Sardaigne aujourd'hui dans le cadre du droit
européen (*)
Université de Sassari
SOMMAIRE: 1. Le problème de la continuité et ses racines. – 2. Les services
de transports maritimes et aériens avant la libéralisation. – 3. La
libéralisation des services de transport maritime et aérien. – 4.- La
continuité territoriale aérienne à l’époque de la libéralisation. – 5. La continuité
territoriale maritime à l’époque de la libéralisation. – 6. Continuité
territoriale et réglementation des services de transport. – 7. Le rôle des
compagnies «low cost». – Abstract.
Je voudrais tout
d'abord vous remercier de l'honneur que vous m'avez fait en m’invitant ici, dans ce
cadre prestigieux, pour débattre d'un
sujet vital pour nos îles et pour leurs habitants.
La position de la
Sardaigne et de la Corse, au sein de la Méditerranée, séparées par les Bouches
de Bonifacio, a été pour longtemps un facteur limitant la croissance
économique. Sur cette condition d'insularité en général je ne peux rien ajouter
à ce qu'a dit mon éminent collègue, le doyen Fois.
Le problème des
transports et de la mobilité en Sardaigne et pour la Sardaigne persiste au
moins depuis les temps du Royaume de la Sardaigne, quand, dans le reste du
monde, la réalité du commerce et de l’échange international allait désormais se
consolider. Et il reste encore actuel. La constatation, faite lucidement dans
la première moitié du XIXe siècle, de la nécessité d'une intégration entre le
transport maritime (et aujourd'hui aussi du transport aérien) entre la
Sardaigne et la Terre ferme et les voies de communications à l'intérieur de
l'île[1].
Les considérations de
cette époque sont encore valides à propos de l'importance des ports, et
aujourd'hui aussi des aéroports, comme condition pour permettre le commerce et
les transports vers l'extérieur. On peut trouver une confirmation à cet égard
dans les événements récents de l'aéroport d'Alghero et ses conséquences sur les
territoires desservis[2].
En outre, l’actuel
système des liaisons terrestres semble très insuffisant en rapport à tout ce
qu'il serait permis par les techniques modernes de réalisation des réseaux
routiers et ferroviaires.
Au-delà des
relations de bon voisinage et de la contiguïté entre les deux îles, comme de
l'histoire et de l’actualité des échanges entre eux, je suis convaincu de
l'importance d'une comparaison entre les solutions proposées à l'égard de la
demande de mobilité de leurs citoyens et de leurs entreprises[3].
Dans cette
comparaison, on doit tenir compte des différences entre les deux îles, en
particulier en ce qui concerne la démographie. La Sardaigne est beaucoup plus
peuplée que la Corse (environ 1.600.000 habitants en Sardaigne contre environ
300.000 en Corse); néanmoins, un tiers de ses habitants est concentré dans la
province de Cagliari, où est installée la grande majorité des institutions
régionales.
D'autre part, sans
vouloir porter un jugement sur l'histoire, il faut prendre note que les deux
îles ont vécu des expériences similaires, qui ont même influencé les relations
mutuelles. La Corse a été cédée à la France par la République de Gênes en 1768;
la Sardaigne à été cédée au Duc de Savoie par la maison de Habsbourg en 1720
suite à la guerre de Succession d'Espagne et à l'échange avec la Sicile.
Suite à ces
événements, les deux îles ont dû couper leur anciens liens, plus ou moins
pacifiques, respectivement, avec Gênes et avec l'Espagne et Naples, et établir
de nouvelles relations, l'une avec la France, et l'autre avec les États
continentaux du duc de Savoie, devenu roi de Sardaigne. D'autre part,
l'application des mesures douanières des nouveaux rois de Savoie a causé la
fermeture du petit commerce traditionnel entre la Sardaigne et la Corse.
Le contexte
économique, politique et social a changé, surtout après la fin de la Deuxième
Guerre mondiale. Le droit à la mobilité des citoyens a été reconnu à différents
niveaux. Comme vous le savez bien, en France, on a, dans le code des
transports, l’affirmation général du principe «Le système des transports doit satisfaire les besoins des usagers et
rendre effectifs le droit qu'a toute personne, y compris celle dont la mobilité
est réduite ou souffrant d'un handicap, de se déplacer et la liberté d'en
choisir les moyens ainsi que la faculté qui lui est reconnue d'exécuter
elle-même le transport de ses biens ou de le confier à l'organisme ou à
l'entreprise de son choix» [Article L. 1111-1].
On trouve aussi
certaines dispositions spécifiques au sujet de la continuité territoriale de la
Corse dans le Code général des collectivités territoriales [Articles L. 4424-18
[4] et
L. 4424-19 [5]].
Quant à l'Italie, il
convient de mentionner l’Article 16 de la Constitution de la République, que
reconnaisse et garantît la liberté de circulation et séjour dans toute partie
du territoire national aussi bien que celle de sortir du territoire de la
République et d’y rentrer. C'est tout à fait l’expression de la tradition libérale des droits de l'homme en Occident. Mais il
faut mentionner aussi l’Article 2 de la Constitution de la République, selon
lequel «La République reconnaît et
garantit les droits inviolables de l’homme, comme individu et comme membre de
formations sociales où s’exerce sa personnalité». On considère le droit à
la mobilité comme une des expressions plus importantes des droits inviolables
de l’homme[6].
Il faut ajouter
qu’on trouve une très forte attention aux problèmes de la mobilité dans le
statut d'autonomie de la Sardaigne (loi constitutionnelle no. 3 du 26 février
1948). L’Article 53 du Statut prévoit un droit de participation de la Région
dans la fixation des tarifs et dans la réglementation des services de transport
qui la concernent. Cette disposition a certainement perdu une partie de son
importance pratique directe dans l’actuelle ère de libéralisation. Cependant,
c’est la reconnaissance du rôle de la région dans la mise en œuvre du droit à
la mobilité.
Au-delà de
l'affirmation des droits, il y a le problème d’éviter qu'elle reste lettre
morte[7].
Malheureusement, il faut reconnaître que la question de la «continuité
territoriale» de la Sardaigne reste toujours partiellement irrésolue, en
particulier, en ce qui concerne le territoire au nord-ouest de l’île.
Le service de
transport maritime entre la Sardaigne et les États continentaux, depuis 1835 a
été confié à la Marine Nationale, avec une solution qui allait paraître coûteuse
et insuffisante. Ensuite, on a suivi le modèle, correspondant à celui développé
en France, de la marine subventionnée et des lignes d’intérêt national, qui
étaient à l'époque identifiées par le Décret-loi royal no. 2081 du 7 décembre
1936.
Les lignes maritimes
vers la Sardaigne ont fait l'objet d'un accord avec la compagnie «Tirrenia»,
faisant partie du système des participations de l'État. Il y avait, en outre,
une activité de ferry opérée, jusqu’au 2009, par la compagnie publique de
chemins de fer, initiée avec le soutien accordé par l'organisme de financement
de l'activité économique dans le Midi de l'Italie («Cassa del Mezzogiorno»).
La compagnie
Tirrenia assurait aussi les liaisons maritimes entre la Sardaigne et les îles
mineures sardes, et celles entre la Sardaigne et la Corse.
Le transport aérien
régulier a été exploité dans le cadre du régime d'aide prévu par le texte
original du code de la navigation, et dans lequel l’exploitant a été, de façon
presque monopolistique, le groupe Alitalia, faisant lui-même partie à cette
époque du système des participations de l'État, inséré dans la logique des
compagnies aériennes nationales («flag
companies»).
Une niche seulement
avait été réservée à l’ancienne «Alisarda» (actuelle «Meridiana»), appartenant à
l’Aga Khan, en raison des mouvements touristiques induits sur la Côte
d’Émeraude.
Il n'y a pas de
doute que tant le contexte économique que le cadre juridique ont radicalement changé,
par rapport au moment où ces solutions avaient été élaborées pour satisfaire
les exigences de transport de la Sardaigne, comme d'autres régions du
territoire national. Le contexte général dans lequel le droit à la mobilité
doit être mis en œuvre a considérablement évolué ces trente dernières années.
Le régime des services maritimes et aériens a été bouleversé. Ces derniers,
dans le cadre original de la Communauté économique européenne, avaient été
exclus du champ d'application des règles de transport, dicté à l'époque par le
titre IV du traité instituant la Communauté économique européenne
Il faut tenir compte
des principes et règles de l’Union européenne, qui ont conduit à la libre
prestation des services de transport maritime et aérien, avec la suppression de
la réserve de cabotage aux navires de pavillon national et aux avions inscrits
sur les registres nationaux, ainsi que de l'abandon du système des
participations publiques dans les compagnies maritimes et aériennes. Dans ce
contexte, l'ère des entreprises publiques, financées sans limites semble
maintenant définitivement révolu, au-delà des initiatives nostalgiques du
gouvernement régional sarde, qui ont conduit à des résultats peu heureux.
Cela a conduit au
dépassement du régime des exceptions accordées aux entreprises de transport
maritime et aérien par rapport à l'état initial des entreprises et de la
concurrence et, en particulier, pour ce qui nous concerne ici de plus près, que
les règles relatives aux aides d’Etat, avec le placement sous le régime de
l'Article 107 TFUE et le confinement de l'intervention publique sous forme de
coûts du service public et de l'aide sociale, au cas où le marché ne donne pas
une réponse appropriée aux besoins de la mobilité, qui ne peut être satisfaite
par un marché encore efficace.
L'instrument
d'obligations de service public a été expressément prévu par l'Article 4 du
règlement (CEE) 2408/92 pour le transport aérien.
En ce qui concerne
les lignes aériennes, il faut maintenant se référer à l'Article 16 et suivants
du règlement (CE) de refonte no. 1008/2008 du 24 septembre 2008 «établissant des règles communes pour
l'exploitation de services aériens dans la Communauté», qui consolide les
antérieurs règlements du troisième paquet communautaire en matière d’aviation
civile du 1992. Comme actuellement l'Article 16, paragraphe 1, du règlement no.
1008/2008 précise, l’obligation de service public doit être destinée à assurer
des «services aériens réguliers entre un
aéroport situé dans la Communauté et un aéroport desservant une zone
périphérique ou de développement située sur son territoire ou sur une liaison à
faible trafic à destination d'un aéroport situé sur son territoire, si cette
liaison est considérée comme vitale pour le développement économique et social
de la région desservie par l'aéroport».
En ce qui concerne
les lignes maritimes, le règlement no. 3577/92 du Conseil, du 7 décembre 1992,
concernant l'application du principe de la libre circulation des services aux
transports maritimes à l'intérieur des États membres (cabotage maritime) a
conduit à la libéralisation de l'accès des entreprises à fournir des services
et l'abolition de la «réserve de cabotage».
Alors que pour les
obligations de service public dans le transport aérien, l'Union européenne a
expressément adopté un certain nombre de principes, il ne l’a fait pas pour
l'obligation de service public dans le transport maritime.
D'autre part, si
l'accès à l'île depuis le continent peut être considéré comme relativement
facile et peu coûteux, grâce notamment aux liaisons aériennes, soit dans le
cadre de la continuité territoriale, soit dans le cadre de services «low cost»,
il faut souligner que, en raison de l'insuffisance des infrastructures et de
l'organisation des services de transport de surface, la poursuite de la
mobilité apparaît souvent (trop) difficile au-delà des lieux directement
desservis par les aéroports. En bref, ce qui reste fondamentalement insuffisant
dans l'île est ce qu'on pourrait appeler la «continuité territoriale dans la
continuité», qui devrait être assurée par une combinaison efficace des services
par route et train.
L'entrée en vigueur
du troisième paquet sur le transport aérien communautaire [Règlement (CEE) no.
2407, no. 2408 et no. 2409 du 23 Juillet 1992, maintenant refondus par le
règlement (CE) no. 1008/2008 du 24 Septembre 2008] a ouvert la voie à la libéralisation du marché du transport aérien.
Actuellement, une
référence aux obligations de service public dans le transport aérien est
contenue dans le code de navigation, le texte est en vigueur depuis la réforme
de la partie consacrée à l'aviation en 2005 - 2006: l’Article 782 du code de la
navigation réformé, après avoir rappelé la nécessité de s'adapter aux
«dispositions communautaires en vigueur», affirme que «le service public de
transport aérien d'intérêt exclusivement régional ou local est régi par les
régions concernées», va, apparemment, au-delà de ce qui aurait pu être garanti
par le législateur ordinaire. En outre, la marge d’appréciation quant à
l’affirmation du caractère exclusivement régional d'une liaison aérienne
soumise à des obligations de service public semble pour le moins très limitée.
Pour la première
mise en œuvre effective de la continuité territoriale aérienne, ne voulant pas
prendre en compte un précédent resté sur le papier du Journal officiel, sans
aucune application pratique, la Sardaigne (unie dans ce destin avec les petites
îles de la Sicile) a dû attendre jusqu’à la mise en œuvre du système prévu par
l'Article 36 de la loi 17 mai 1999, no. 144.
L'application
pratique de ce régime n'était pas toujours idéale pour satisfaire les besoins
de la population, surtout celle du nord-ouest de la Sardaigne.
En outre, en ce qui
concerne la fixation des obligations de service public, on n'a pas dûment tenu
compte des nécessités spécifiques de passagers à destination des lignes qui
font l’objet des obligations. En deux occasions, les compagnies aériennes qui
se sont vues attribuer les lignes de l’aéroport d’Alghero n'avaient pas
souscrit des accords interlignes avec d’autres compagnies italiennes.
La première fois, ce
n’était pas tellement grave. En 2001, les lignes à destination de Milan et de
Fiumicino avaient été attribuées à Airone, à cette époque concurrente de
Alitalia, qui refusait d'exploiter les liaisons en interligne, bien que les
deux compagnies soient parties prenantes de l’accord général de l’IATA.
On peut regretter
cette conduite d’Alitalia. La situation pour les passagers était désagréable,
mais ils avaient toujours la possibilité de poursuivre leur voyage vers
d'autres destinations, au moyen du réseau d’Airone et des autres compagnies qui
appliquaient l’accord interligne.
En 2014, la ligne
Alghero/Fiumicino avait été attribuée à une compagnie de charter, New
Livingston, qui n’avait pas d’accords interlignes, ni la possibilité de
délivrer par Internet les cartes d'embarquement. En outre, la quantité de
bagage comprise dans le prix du billet était très limitée et les tarifs pour
les excédents de bagages étaient anormalement élevés. Cette Compagnie a cessé ses opérations après que la Région Sardaigne eut dénoncé la
mauvaise exécution du contrat[8]
et que l'Autorité
italienne de l'aviation civile eut suspendu sa licence.
Il me semble tout à
fait évident que quelque chose dans la fixation du contenu des obligations de
service public n'avait pas fonctionné. Je suis convaincu que, au moins pour
l’application des obligations de service public, il est nécessaire de
distinguer déjà au niveau de la législation de l’Union européenne entre
transporteurs et compagnies de Charters. Jusqu'à présent, le règlement (CE)
1008/2008 ne fait aucune différence entre la typologie de service aérien avec
référence à la licence d'exploitation.
Pour la continuité
territoriale maritime, la Sardaigne attends toujours de connaître une véritable
solution, compatible avec le cadre du droit de l’Union européenne. La simple
prorogation du régime de convention avec la Compagnie CIN, au-delà des doutes
sur sa légitimité, ne semble pas adéquate pour répondre aux besoins de la
Sardaigne, surtout en ce qui concerne le transport de marchandises à
destination ou en provenance de l'île[9].
Encore aujourd'hui,
le service public de liaison avec les grandes îles (Sardaigne et Sicile) est
géré par la «Compagnia Italiana di Navigazione», l’ancienne «Tirrenia», après
sa privatisation controversée de 2012, en vertu de la dernière convention
prolongée, signée le 18 juillet 2012; cette dernière semble ignorer les
échéances fixées par le règlement CEE no. 3577/1992, à l’Article 4, § 3[10]
À la fin de 1986,
les lignes entre la Sardaigne et les îles mineures sardes ont été transférées à
la nouvelle compagnie «Saremar», société de navigation entièrement propriété de
la Région Sardaigne, créée à la suite du processus de libéralisation du
cabotage maritime, commencé par le Règlement (CEE) n° 3577/92 du Conseil,
du 7 décembre 1992, «concernant
l'application du principe de la libre circulation des services aux transports
maritimes à l'intérieur des États membres (cabotage maritime)». Cette
dernière compagnie a cessé ses activités au 31 décembre 2015, pour les dettes
excessives accumulées à cause de décisions politiques à courte vue. C'était la
conséquence de l’initiative téméraire dite de la «Flotta Sarda» (c’est-à-dire,
littéralement, «Flotte Sarde»). La Région avait exigé que sa compagnie Saremar
fasse de la concurrence aux compagnies privées sur les liaisons entre la
Sardaigne et les ports de Gênes et de Civitavecchia, afin d’optimiser
l’accessibilité économique pour les utilisateurs[11].
A la fin d’une
longue gestation, on a créé l'Autorité de la réglementation du transport. Parmi
les responsabilités confiées à cette Autorité, conformément au paragraphe 2,
lettre d, Article 37 du décret-loi 6
décembre 2011, no. 201, une de plus importantes est celle d’«établir la qualité minimale des services nationaux
et locaux de transport caractérisés par des obligations de service public,
identifiés en fonction des caractéristiques locales de l'offre et de la demande».
En vertu de la première partie de la lettre f
du même Article 37, paragraphe 2, l'Autorité est aussi chargée d’«élaborer les modèles d'appels d'offres pour
l'attribution exclusive de services de transport et des conventions à inclure
dans les cahiers généraux des charges
relatifs et d'établir des critères pour la nomination des commissions
d’attribution».
Il ne semble pas
douteux que la règle se réfère aussi aux liaisons maritimes et aériennes de la
«continuité territoriale». Il convient donc d'examiner si et comment cette
compétence peut se chevaucher avec celles d'autres organismes publics ou
d'autres autorités.
Un problème de
coordination se pose en particulier en ce qui concerne les obligations de
service public dans le transport aérien, étant donné le rôle particulier de
l’Administration italienne de l’aviation civile - «ENAC», qui a été chargée par
le texte actuel de l'Article 687 du code de la navigation, d'agir «dans le respect des pouvoirs du ministre des
infrastructures et des transports, et sans préjudice des compétences
particulières des autres organismes de l'aviation, [...] comme la seule autorité de règlementation technique, de certification, de surveillance et de
contrôle dans le domaine de l’aviation civile».
Il ne semble pas
inutile de retracer les dernières étapes qui ont conduit à cette structure
institutionnelle du secteur en question. En général, l'Autorité des transports
a été mise en place «dans un contexte dans lequel il reste des compétences aux
autres agences et autorités».
Le principal domaine
d'activité de la nouvelle autorité est d'occuper un espace sur lequel avait
déjà travaillé l'Autorité de la concurrence et du marché («AGCM»), qui avait eu
à plusieurs reprises l'occasion de mettre en évidence dans ses rapports au
Parlement, l’opportunité de confier cette tâche à un organisme plus spécialisé[12].
A l'époque, il n’y avait pas de doute sur le fait que les pouvoirs de
l'Autorité de la concurrence pouvaient coexister avec ceux de l’ENAC; il est
également vrai que l'exercice effectif du droit à la mobilité peut être affecté
par les comportements des entreprises, qui sont en même temps préjudiciables au
bon fonctionnement du marché, et aux droits des consommateurs. Le contrôle sur
ces derniers profils est confié en général à l’AGCM, respectivement, par la loi
10 octobre 1990, no. 287 et par le décret-loi du 6 septembre 2005, no. 206
(«Code de la consommation»). En outre, en ce qui concerne la protection des
consommateurs, le paragraphe 1 bis de
l'Article 27 du code de la consommation, en réaffirmant, même avec des règles
différentes, la compétence sur la question des pratiques commerciales déloyales
de l’Autorité de la concurrence, prévoit que celle-ci demande l'opinion de
l'Autorité de régulation concernée.
Il faut, enfin,
considérer la mobilité des personnes, aussi dans l'optique du tourisme, dont
l’importance est indubitable dans l'économie de la Sardaigne.
L'afflux de
touristes a souffert dans le passé, en raison des prix élevés des ferries.
Dans ce contexte, le
succès croissant des compagnies «low cost»
a contribué de manière considérable à développer les flux de trafic passager,
en stimulant ainsi une réflexion sur la possibilité de satisfaire à travers
elles aussi la demande de transport destinée à la satisfaction des exigences de
«continuité territoriale»[13].
Probablement, ce moment n'est pas le plus heureux pour traiter ce sujet, tenu
compte du problème actuel à propos de l'aéroport d'Alghero et de la position
d'une célèbre compagnie aérienne irlandaise, qui semble sur le point de cesser
ses opérations à partir de cet aéroport.
Il me semble qu'il y a dans tout cela beaucoup de malentendu. Il faut
souligner que les aides au démarrage octroyées aux compagnies aériennes en vue
du lancement d’une nouvelle liaison (considérés comme étant compatibles avec le
marché intérieur si sont remplies les conditions énoncées dans les Lignes directrices sur les aides d’État aux
aéroports et aux compagnies aériennes de 2014)[14]
sont tout à fait différentes des compensations des obligations de service
public en vertu de l’article 17, § 8, du règlement (CE) 1008/2008, qui sont
liés au respect des procédures d'appel d'offres établies en vertu de ce
règlement. Finalement, l'aide dont les compagnies aériennes «low cost» peuvent profiter sont l'aide
de «start up», qui ne peut excéder
une période de trois ans, et qui sont destinées à l’incitation des compagnies
aériennes[15],
pas «à assurer sur cette liaison une
prestation minimale de services aériens réguliers» (ceci est plutôt le
terrain des obligations de service public, en vertu de l’article 16 du
règlement (CE) 1008/2008)[16].
En outre, la structure de services «low
cost» est telle qu’elle ne peut pas satisfaire le droit à la mobilité des
citoyens.
The
author reconstructs the history of the connections of Sardinia and Corsica with
mainland, till the era of liberalization in maritime and air services,
comparing solutions adopted by Italy and France for those islands under EC Law
. He highlights current difficulties in mobility experienced by north-western
Sardinia. He contests that low-cost air services are sufficient to meet
transport needs in the perspective of “territorial continuity”.
L’autore ricostruisce la storia dei collegamenti di Sardegna e Corsica
con la terraferma, fino all’epoca delle liberalizzazioni di trasporto marittimo
e trasporto aereo, comparando le soluzioni adottate per le due isole da Italia
e Francia, nell’applicare la disciplina comunitaria. Evidenzia le particolari
difficoltà di collegamento che affliggono la Sardegna nord-occidentale e
contesta che i servizi aerei low cost
siano sufficienti a soddisfare le esigenze di trasporto nell’ottica della
“continuità territoriale”.
[Un
evento culturale, in quanto ampiamente pubblicizzato in precedenza, rende
impossibile qualsiasi valutazione veramente anonima dei contributi ivi
presentati. Pertanto, questo articolo è stato valutato “in chiaro” dai
promotori del Workshop Insular
Territories and Europeanizazion e dalla direzione di Diritto @ Storia]
(*) Texte du rapport au Workshop «Insular Territories and
Europeanization», 9-10 novembre 2016, Université de Corse.
Trabajo realizado en el marco del Proyecto de
Investigación “El transporte como motor
del desarrollo socio-económico: soluciones legales”, financiado por el
Ministerio de Economía y Competitividad (Ref. DER2015-65424-C4-1-P) y
cofinanciado por el Fondo Eu.
[1] V., à cet égard, A.
Della Marmora, Quistioni marittime spettanti all’Isola di Sardegna,
Cagliari 1830, 3 s., se référant au système de la rue «Carlo Felice»
(aujourd’hui «S.S.131»).
[2] Par plusieurs fois la tentative de vendre et de
privatiser la société de gestion de l'aéroport, grevée de dettes, est resté
sans aucun succès. Tout récemment, le gouvernement régional a approuvé le plan
de recapitalisation.
[3] Sur les services de
continuité territoriale pour la Corse, v. récemment A. Fazi, X. Peraldi, La
continuità territoriale della Corsica: il gran pasticcio?, in M. M.
Comenale Pinto (dir.), La continuità
territoriale della Sardegna. Passeggeri e merci, low cost e turismo,
Rome 2015, 149.
[4] «La collectivité
territoriale de Corse définit, sur la base du principe de continuité
territoriale destiné à atténuer les contraintes de l'insularité et dans les
conditions de l'article L. 4425-4, les modalités d'organisation des transports
maritimes et aériens entre l'île et toute destination de la France
continentale, en particulier en matière de desserte et de tarifs».
[5] «Des obligations
de service public sont imposées par la collectivité territoriale de Corse sur
certaines liaisons aériennes ou maritimes pour assurer le principe de
continuité territoriale. Ces obligations ont pour objet, dans le cadre adapté à
chaque mode de transport, de fournir des services passagers ou fret suffisants
en termes de continuité, régularité, fréquence, qualité et prix et, le cas
échéant, de capacité, pour atténuer les contraintes liées à l'insularité et
faciliter ainsi le développement économique de l'île, l'aménagement équilibré
du territoire insulaire et le développement des échanges économiques et humains
entre l'île et la France continentale. Lorsque la collectivité territoriale de
Corse décide de soumettre des liaisons de desserte aérienne à des obligations
de service public, elle peut, dans le respect des procédures de publicité
applicables, désigner pour l'exploitation de ces liaisons des compagnies
aériennes titulaires d'une licence d'exploitation de transporteur aérien
délivrée par un Etat membre de l'Union européenne ou partie à l'Espace
économique européen. Lorsque la collectivité territoriale de Corse décide de
soumettre des liaisons de desserte maritime à des obligations de service
public, elle peut, dans le respect des procédures de publicité et de mise en concurrence
applicables, désigner pour l'exploitation de ces liaisons des compagnies
maritimes dont la flotte est immatriculée dans un Etat membre de l'Union
européenne ou partie à l'Espace économique européen et battant pavillon de cet
Etat membre ou partie, sous réserve que les navires de cette flotte remplissent
toutes les conditions fixées par cet Etat membre ou partie pour être admis au
cabotage. Pour les liaisons de dessertes aériennes ou maritimes, la
collectivité territoriale de Corse peut également établir un régime d'aides
individuelles à caractère social pour certaines catégories de passagers».
[6] V., a cet ègard, G. Rinaldi Baccelli, Per un inquadramento sistematico del diritto
della persona al trasporto pubblico, in Riv.
dir. civ., 1991, 21; G. Carboni,
Il diritto alla mobilità dei cittadini
europei, in M. Comenale Pinto
(dir.) La continuità territoriale della
Sardegna. Passeggeri e merci, low cost
e turismo, Rome 2015, 3.
[9] Actuellement, à ce
sujet, on a deux projets de loi sous discussion parlementaire: No. 3279 –
Camera dei deputati, «Norme per garantire i collegamenti marittimi con la
Sardegna», d'initiative des députés Mura et autres, presenté le 5 août 2016; No. 3706 – Camera dei
deputati «Norme per garantire i collegamenti marittimi con la Sardegna»,
d'initiative des députés Bianchi et autres, presenté le 30 mars 2016.
[10] «Les contrats de
service public existants peuvent rester en vigueur jusqu'à leur date
d'expiration». Cela ne semble pas autoriser une prolongation de la date d'expiration.
[11] La décision de la Commission européenne du 22 janvier
2014 relative aux mesures d’aides SA.32014 (2011/C), SA.32015 (2011/C),
SA.32016 (2011/C), a déclaré contraire au marché intérieur l’aide que la Région
Sardaigne avait octroyée à Saremar pour assurer la réalisation du service de
transport de cabotage entre la Sardaigne et le continent, effectué en
2011-2012. La Région a introduit un recours contre cette décision devant le
Tribunal de l’Union européenne (affaire T-219/14). Le sort finale de cette
compagnie maritime était le même que celui subi en France par la SNCM, à son
tour victime de choix politiques erronées: cfr. A. Leroy – P. Giacobbi, Rapport
d'enquête sur les conditions de la privatisation de la Société nationale Corse
Méditerranée (SNCM), Assemblé Nationale, 2013.
[13] A cet règard, v. G.
Pruneddu, Sistemi di prenotazione elettronica,
compagnie aeree low cost, sviluppo turistico, in U. La Torre - A. M. L. Sia (dir.), Diporto e turismo tra autonomia e
specialità. Un’occasione per un incontro interdisciplinare, atti delle
giornate di studio Università degli studi Magna Graecia di Catanzaro, 7 e 8
marzo 2013, Roma 2014, 461; Id., Compagnie aeree low cost: una soluzione all’attuale regime di
continuità territoriale?, in M. M. Comenale
Pinto (dir.), La Continuità
territoriale della Sardegna, Roma 2015, 333.
[14] Lignes directrices sur les
aides d’État aux aéroports et aux compagnies aériennes,
Communication de la Commission (2014/C 99/03), § 138 et suiv.
[15] «Les aides au démarrage en faveur de
compagnies aériennes ont un effet d’incitation s'il est probable qu'en leur
absence, le niveau d'activité économique de la compagnie aérienne dans
l'aéroport concerné ne se développerait pas. La nouvelle liaison, par exemple,
n'aurait pas été ouverte»: cfr. Lignes directrices sur les aides d’État aux aéroports et
aux compagnies aériennes,
Communication de la Commission (2014/C 99/03), § 148. Cette affirmation se pose
dans l'esprit de la communication précédente du 2005, lignes directrices sur le
financement des aéroports et les aides d’État au démarrage pour les compagnies
aériennes au départ d'aéroports régionaux (2005/C 312/01).